Gérardmer 2014 : 3ème jour

21ème Film Fantastique de Gérardmer

3ème jour 

Avant-dernière journée pluvieuse… D’ailleurs, comme chaque année, la zombie walk souffre d’un temps catastrophique.

Présenté en compétition, Ablations, réalisé par le français d'Arnold de Parscau, est une petite trouvaille écrite par Benoit Delépine. Le cinéaste, qui revendique une influence polanskienne et lynchienne, tente un pari compliqué mais globalement réussi : présenter la dérive émotionnelle d’un homme qui se fait voler un rein durant son sommeil à l’occasion d’une cuite épique. Magistralement incarnés par Denis Ménochet (déjà très bon dans Nos Héros sont morts ce soir de David Perrault) et Philippe Nahon, des « gueules » à la française dignes du cinéma des années 60, les personnages entraînent le spectateur dans un récit quasi hypnotique. Le film fait s’entremêler des cauchemars stylisés, de l’humour noir à la belge et une trame de polar d’un classicisme éprouvé. Le problème réside précisément dans cette articulation compliquée entre ces trois tons : à force de courir tous les lièvres à la fois, le réalisateur a parfois du mal à trouver le rythme adéquat et le passage de l’un à l’autre. Néanmoins, la finesse psychologique et le soin apporté à l’ensemble viennent largement contrebalancer les défauts d’un premier long-métrage. On aimerait que le cinéma de genre français soit plus souvent de cette qualité.

 

Le meilleur film de la journée, et certainement l’un des plus intéressants cette année, était sans conteste L’Etrange Couleur des larmes de ton corps, réalisé par les controversés Hélène Cattet et Bruno Forzani. Accueillis fraîchement à Gérarmer en 2010 pour leur premier film Amer, les deux cinéastes persistent et signent. Leur nouvelle proposition est encore une fois un trip hypnotique stylisé et langoureux, hommage sincère au giallo, qui radicalise les archétypes du genre. Sur une trame narrative plus que maigre – un homme tente désespérément de retrouver sa femme récemment disparue – les metteurs en scène proposent un tour de force technique à partir des éléments constitutifs du genre : sexualité exacerbée, mains gantées enserrant le cou des victimes, armes blanches qui découpent et pénètrent la peau, musique rétro qui rappelle Ennio Morricone ou les Goblin, décor baroque tout droit sorti de Suspiria de Dario Argento. L’alternance et la répétition des séquences oniriques produisent un effet lancinant sur le spectateur, fasciné (ou exaspéré) par l’utilisation de toute une panoplie de procédés cinématographiques : gros plans sur la bouche et les yeux, jeux de contrastes hallucinants sur les couleurs, séquences entières en stop motion, caméra subjective omniprésente. Si l’on peut regretter la proximité formelle avec Amer, il faut admettre qu’une telle saillie dans le cinéma de genre, évoquant L’Année dernière à Marienbad, Les Frissons de l’angoisse, ou encore Blue Velvet, ne peut que susciter l'admiration.

 

Dans le même registre de l’hommage au giallo, Sonno Profondo de l’argentin Luciano Onetti, est l’exemple type du film sympathique mais totalement inutile. S’il est possible de sourire à la reprise des codes du genre de façon aussi cheap durant les dix premières minutes, il devient rapidement insoutenable de constater la maigreur d’une mise en scène qui se contente de proposer, en caméra subjective, l’exposition du dallage de l’appartement du tueur ou la cage d’escalier d’un hôpital en très gros plans. Bref, le réalisateur aurait peut-être dû mieux s’entourer, lui qui est crédité à la réalisation, à la production, au scénario, à la direction de la photo, au montage, à la musique et même à l’interprétation.

C’est toujours mieux que Patrick de l’australien Mark Hartley, incarnation du cinéma de genre bêtement conventionnel. L’infirmière Kathy est engagée dans une clinique isolée pour s’occuper de patients dans le coma. Le docteur Roget lui confie notamment la garde de Patrick, jeune comateux doté de pouvoirs paranormaux. Des situations aux personnages, tout est totalement stéréotypé : de la rencontre fortuite avec le beau gosse du coin, jusqu’au psychodrame familial de l’infirmière en chef (qui n’a rien d’autre à faire que brutaliser cette jeune recrue), tout semble avoir été vu maintes fois dans tous les films d’exploitation de ce type. D’autant plus que le pouvoir télé-kinésique de Patrick, qui googlise sa protectrice et fait brûler les mains de ces amants, transforme le récit horrifique en vaudeville nanardesque. Malheureusement, le film n’est même pas assez raté pour satisfaire les amateurs de navets. Une très mauvaise série B.

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