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Confession d'un Cannibale

Avec un sujet volontairement prompt à susciter la curiosité morbide qui sommeille en nous, Grimm love nous conte l’histoire de deux hommes torturés par leurs démons intérieurs.<br> Tandis que l’un deviendra une victime consentante, l’autre annihilera toute part d’humanité en lui. Un récit éprouvant sur le plan psychologique qui permet de se rendre compte que la réalité ne dépassera jamais la fiction sur le plan de la barbarie.
Publié le 26 Octobre 2010 par Dante_1984Voir la fiche de Confession d'un Cannibale
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Cannibales Internet

Inspiré de l’histoire vraie d’Armin Meiwes, Grimm love s’attache à décrire avec précision et objectivité ce fait divers incroyable et abominable qui a défrayé la chronique au-delà des frontières allemande en 2001. Petit rappel des faits : Armin, informaticien perturbé par la mort de sa mère, se réfugie sur le net. Là, il y découvre un forum de cannibalisme où il poste une annonce afin de trouver une personne consentante pour se faire manger, au sens propre du terme. Après plusieurs essais infructueux, il la découvre. Brend Brandes veut mourir afin d’assouvir un étrange fantasme qui le torture depuis sa plus tendre enfance. Armin sera condamné à la prison à perpétuité pour ce meurtre pas comme les autres.


Un exemple des filtres apposés aux souvenirs. Magnifique.

C’est donc en compagnie de Katie, jeune étudiante en criminologie qui décide d’orienter sa thèse sur Oliver Hartwin, un cannibale qui a tué et mangé sa victime, que nous allons découvrir ce récit sordide. Son enquête la plonge dans un univers qu’elle n’aurait jamais soupçonné exister. On peut s’interroger sur le choix de la jeune femme pour rédiger sa thèse sur un tueur cannibale. Néanmoins, il suffit d’observer les remous causés par l’affaire pour y voir une curiosité morbide qui tente à être satisfaite par tous les moyens. La question qui brûle toutes les lèvres, aussi bien les miennes que les vôtres et, à fortiori, celles de notre charmante protagoniste : Comment peut-on en arriver à un tel stade dans l’horreur ? Notre volonté de traquer le mal dans ces aspects les plus vils, les plus pervertis nous plonge dans une véritable descente aux enfers. Un voyage qui n’est pas sans conséquence puisqu’il nous entraîne dans les derniers vestiges de l’âme humaine. Là où se complait le vice, les pires exactions possibles et inimaginables. Là où se terre nos instincts bestiaux, refoulés par des siècles et des siècles d’une évolution dite « civilisée ». La barbarie dont est capable l’homme peut jaillir parmi n’importe lequel d’entre nous. Il suffit d’un simple déclic au moment opportun pour déclencher un mécanisme irréversible. Un engrenage qui, une fois en marche, est impossible à stopper dans sa folie dévastatrice. C’est cette fascination pour le mal absolu qui motive la jeune Katie dans ses recherches qui ne mesure pas encore toutes les conséquences de ses actes. Grimm love vous entraîne dans les méandres psychologiques d’êtres torturés par leurs pulsions. Des fantasmes qui rongent de l’intérieur aussi bien l’assassin que la victime. Une gangrène latente qui, tel un cancer, s’investit dans leur organisme. Un tourment infini, les hantant sans répit.


Katie, fascinée par l’histoire d’Oliver Hartwin.

Premier long-métrage de Martin Weisz – à qui l’on doit également la suite très discutable du remake de La colline a des yeux – Grimm love décrit l’horreur des faits par le biais d’un traitement psychologique poussé. Aussi, si vous comptez trouver des scènes de cannibalisme et autres tortures extrêmes dans le film présent, vous serez déçu. Ce n’est pas l’hémoglobine qui coule à flot, mais les tourments dérangés des deux personnages principaux. En cela, Grimm love se rapproche davantage du thriller psychologique qu’un film d’horreur distillant une violence graphique explicite. Même la séquence finale en montrera le minimum ne retenant que les passages les plus « marquants », plutôt que de tomber dans le piège du spectaculaire, ce qui n’est clairement pas l’objectif du film. Violence il y a, mais pas dans le sens qu’on peut l’entendre. Sous-jacente à chaque pensée, chaque geste qui régit leurs vies. Le rythme est volontairement lancinant afin de nous faire prendre la pleine mesure de leur engagement réciproque l’un envers l’autre.


Une plongée au cœur des limbes ténébreuses de l’âme.

Les transitions entre passé et présent se veulent fluides et toujours bien amenées. Dans un sens comme dans l’autre, l’immersion se fait immédiatement. Les endroits côtoyés par l’assassin et sa victime et surtout leur demeure où leur intimité sont montrés sans pudeur, mais surtout sans artifices prompt à ce genre de productions, le cinéaste dépeint le quotidien morose de deux êtres qui, de prime abord, n’avait rien en commun pour que leur destin se croise. On plonge dans cet environnement austère où les intérieurs suintent un profond malaise, comme si le temps gardait une empreinte des exactions commises en ces lieux. Grâce à des filtres monochromes absolument somptueux, le récit se renforce d’une tension dramatique presque palpable. Puis, peu à peu, le passé prend le pas sur la réalité. Synonyme que Katie est complètement absorbé par les faits qui, lentement mais sûrement, s’insinue en elle. A tel point que l'enquête tourne à l’obsession.


J’espère que vous appréciez le repas !

Par le biais de son actrice principale, le cinéaste ne tente pas d’excuser ou de justifier le comportement des deux hommes. Il tente simplement de poser un regard extérieur pour comprendre la part d’ombre habitant ces deux hommes. Des démons intérieurs qui sont présents en chacun de nous. Parfois ils sont enfouis trop profondément pour qu’ils surgissent au cours de notre vie. Parfois, ils se révèlent juste à la surface. Il suffit de gratter un peu le vernis de la bienséance pour les découvrir. En cela, Grimm love s’appesantit davantage sur l’horreur sous-jacente qui nous entoure et donc, nous concerne directement, afin d’instaurer une atmosphère glauque et oppressante dans ce tourment vindicatif de violences et de barbaries. A aucun moment, le cinéaste n’appose pas l’étiquette « Monstre » sur Oliver Hartwin. Cette manière si puérile de rejeter l’autre pour ce qu’il a commis en lui dénigrant toute once d’humanité. Certes, il a renoncé à une part de cette même humanité en tuant et mangeant sa victime, mais il n’en demeure pas moins un homme. C’est ce reflet intransigeant que refuse de voir la plupart des gens. L’irisation incandescente de ce mal absolu à la portée de tous.


Le fantasme obsessionnel du cannibalisme.

Bien que la fiction n’atteindra jamais la véracité terrifiante de la réalité, Grimm love est une belle démonstration d’un cinéma multipliant, tour à tour, le drame, l’horreur et le thriller psychologique. Un exercice rendu de fort belle manière par une mise en scène sobre et des interprètes impliqués qui ne sombre nullement dans l’excessif. Le film de Martin Weisz apporte un regard préoccupant sur la nature humaine nourrit par un désespoir permanent. Un film qui pourra en décevoir certains par sa lenteur ou son manque d’hémoglobine (ce qui, je le rappelle, n’est pas l’intention de départ), mais recèle une histoire plus complexe qu’il n’y paraît. Ce n’est pas tant l’horreur des faits qui nous interpelle dans le cas présent, mais le cheminement parcouru pour l’atteindre. Un film sombre et troublant à plus d’un titre.


La fameuse annonce postée sur Internet. « Pas sérieux, s’abstenir. »

Enfin, pour ceux qui souhaiteraient approfondir le sujet sur ce fait divers, je ne peux que conseiller de voir les documentaires « L’homme qui dévora son amant » de S. Narayanan et « Le cannibale de Rothenburg » de Jane Cameron. Bien que les ouvrages foisonnent sur le sujet outre-Rhin, en France, seul le livre d’Erik Rémès tend à analyser l’affaire avec parcimonie et objectivité : « Kannibal – L’histoire terrifiante du cannibale de Rothenburg », disponible aux éditions Blanche.

« La meilleure façon de résister à la tentation, c’est d’y céder. » – Oscar Wilde

A propos de l'auteur : Dante_1984
Portrait de Dante_1984

J'ai découvert le site en 2008 et j'ai été immédiatement séduit par l'opportunité de participer à la vie d'un site qui a pour objectif de faire vivre le cinéma de genre. J'ai commencé par ajouter des fiches. Puis, j'ai souhaité faire partager mes dernières découvertes en laissant des avis sur les films que je voyais.

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Confession d'un Cannibale
Réalisateur:
Sortie France:
Durée:
90 min
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