Conjuring : Sous l'emprise du diable
En considérant les spin-offs, la saga Conjuring a donné lieu à 8 films en un peu moins de 10 ans. Avec Insidious, elle constitue l’une des franchises les plus notables du cinéma de genre des années 2010. Certes, certaines de ces productions présentent un niveau qualitatif moindre. Pour autant, il n’en demeure pas moins une incursion globalement convaincante dans le domaine de l’épouvante. Après deux premiers opus réalisés sous la direction de James Wan, Conjuring se voit confier à Michael Chaves à qui l’on doit La Malédiction de la dame blanche. Une production médiocre et mal maîtrisée qui suggère des craintes légitimes quant à l’orientation de cette suite.
Comme un air de déjà-vu...
Somme toute classique dans sa présentation des faits, l’entame augure de l’exorcisme d’un jeune garçon. On retrouve le cadre du foyer familial avec une mise en situation immédiate. On distingue, entre autres, les stigmates des phénomènes paranormaux et de la tentative d’exorcisme elle-même. L’approche frontale se veut sans subtilité aucune, s’appuyant sur les sempiternels subterfuges qui ne décrochent aucun effroi ni sursaut. Au sortir de ce premier affrontement avec le « mal », l’intrigue s’oriente dans une tout autre direction, se penchant sur l’affaire Arne Johnson. Le cas a défrayé la chronique au cours des années 1980 puisque l’intéressé plaide la possession et est reconnu comme tel lors de son procès.
D’un point de vue chronologique, on distingue une certaine cohérence avec l’évocation des sixties et des seventies, respectivement dans les deux précédents opus. Par la même, cela permet de développer la caractérisation du couple Warren, leur rapport à autrui et aux phénomènes surnaturels. On sent également des personnages vieillissants où leur expérience est inversement proportionnelle à leur bonne santé physique, sinon mentale. Et c’est précisément sur ce point que le film s’appuie : la vulnérabilité des protagonistes qui, jusqu’alors, n’a jamais été aussi exacerbée. Auparavant, il persistait un recul, une implication toute mesurée avec les évènements en question.
Amis contorsionnistes, bonjour !
Ici, le couple Warren est lui-même concerné par la menace, car il ne s’agit pas uniquement de forces maléfiques. Conjuring : Sous l’emprise du diable apporte alors un danger plus tangible sous l’angle du satanisme et de considérations matérialistes. En l’occurrence, leurs investigations évoluent vers les agissements ésotériques d’un mouvement sectaire, du moins est-ce là la première impression qui s’en dégage. L’intrigue ne se focalise pas sur les phénomènes, mais sur des recherches à la tonalité malsaine. De la confrontation au mal, on se heurte désormais à une fascination plus dérangeante, car directement associée à la nature humaine.
En cela, cet angle d’approche sauve sûrement le film de l’itération douteuse. Au fil de la progression, on distingue néanmoins des errances de mises en scène déjà commises avec La Malédiction de la dame blanche. On songe à ce montage relativement capricieux où l’alternance des points de vue se veut confus en début de parcours, tout comme certains allers-retours temporels dispensables. Cependant, on apprécie l’amalgame entre hallucinations et réalité pour dépeindre les phénomènes paranormaux. Si l’ensemble n’est guère effrayant, mais plutôt oppressant à certains moments, ce choix permet de contourner l’absence toute relative d’originalité pour mettre en branle les mécaniques de la peur.
Rien de tel qu'une messe noire pour bien démarrer la journée
Au final, Conjuring : Sous l’emprise du diable est une suite sensiblement différente de ses prédécesseurs. On ressent le passage de relais entre les metteurs en scène. Ce qui influe sur la qualité générale du métrage. D’excellents a priori pour les réalisations de James Wan, on se confronte à une production sans fulgurance ni relief, aux maladresses évidentes. Il est à regretter ce traitement brut de décoffrage en ce qui concerne la tonalité surnaturelle de l’intrigue, rendant la progression prévisible, y compris pour les manifestations. En contrepartie, des efforts ont été consentis pour présenter une affaire paranormale sous un angle plus pragmatique qu’à l’accoutumée. Cela tient à la plaidoirie du coupable en filigrane, mais aussi à l’enquête du couple Warren et son incursion dans les strates méphitiques du satanisme. Un résultat qui souffle donc le chaud et le froid qui, sans être catastrophique, n’est pas non plus remarquable.
Un film de Michael Chaves
Avec : Vera Farmiga, Patrick Wilson, Julian Hilliard, Sterling Jerins