Doom Annihilation
Il est malheureusement de notoriété publique que le cinéma et les jeux vidéo ne font guère bon ménage quand il s’agit d’adapter une œuvre vers l’autre format. De titres à licence bâclés en longs-métrages qui relèvent du navet ou du nanar, il est difficile de trouver des productions notables, hormis le Silent Hill de Christophe Gans. En 2005, Andrzej Bartkowiak réalisait Doom, jeu culte que l’on ne présente plus. Bien qu’il ait subi les foudres des critiques professionnels et amateurs, il en ressortait un divertissement honorable sans grande prétention. On n’attendait pas forcément de suite et, pourtant, Universal dépoussière la licence pour nous infliger un DTV dont la notoriété est passablement inquiétante.
Prêt à atterrir sur un misérable caillou ?
S’il a beau être l’un des précurseurs du FPS, Doom n’a jamais brillé par son scénario. Aussi, il paraît difficile d’étayer une intrigue foncièrement crédible, à défaut de se montrer travaillée et surprenante. Pour autant, il y a une marge entre un potentiel limité où l’on peut tirer avantage de certains éléments et une paresse ostentatoire des plus accablantes. Doom Annilhilation se contente de recycler les grandes lignes de son prédécesseur en y insufflant quelques expérimentations qu’on a pu retrouver dans le reboot vidéoludique de 2016. À savoir, des tests de téléportation qui ouvrent la porte vers une dimension infernale. Au passage, les «auteurs» peuvent remercier des œuvres emblématiques telles qu’ Event Horizon, mais uniquement dans les intentions.
L’escouade de marines atterrit alors sur Phobos, l’une des lunes de Mars. Bien que désertique et limité par sa superficie, l’environnement extérieur joue une certaine importance dans la saga Doom. Ici, Phobos s’apparente à une vulgaire météorite dans laquelle on a effectué des travaux de terrassement pour y poser une base aussi réduite que mal pixellisée. Non seulement il n’y a rien à attendre de ce côté, mais le huis clos intersidéral horrifique auquel on est en droit d’assister tourne court. C’est bien simple, il n’y a aucune exploitation cohérente de la base spatiale. On enchaîne les couloirs éclairés chichement (affublés de teintes «jaune pisse») avec des serres laissées à l’abandon, ainsi que des laboratoires et des salles de repos.
Un baiser volé dès le premier rendez-vous ?
De même, on ne ressent aucune sensation oppressante ou la suggestion d’un danger qui sourde à chaque détour. La réalisation ne s’entiche guère de jouer sur l’obscurité ou les jeux de pénombre, comme on avait pu les apprécier dans le jeu Doom 3. Et pourtant, ce dernier est de 15 ans son aîné ! Chaque irruption des ennemis reste navrante de prévisibilité et ne suscite qu’une profonde affliction face à cette débandade clairement affichée. À voir les zombies (ou les mutants possédés) se trémousser, on ressasse les frasques de leurs homologues dans l’effroyable House of the Dead d’Uwe Boll. D’ailleurs, les costumes et les maquillages sont tout aussi indigents.
Il faut se contenter de ces créatures et de figurants déguisés en diablotin. Cerise sur le gâteau, ces derniers lancent leurs familières boules de feu qui, en ces circonstances, sont d’un ridicule consommé à l’écran. Mais les producteurs ont voulu pousser le fan service jusqu’à un niveau d’inutilité rarement atteint. Côté arsenal, on retrouve l’incontournable BFG9000 qui en imposait plus dans les bras de Dwayne Johnson ou le fusil à canon scié. Le casque des marines propose une vision subjective mal exploitée et vite oubliée. En ce qui concerne les raccourcis narratifs et géographiques, on peut évoquer les cartes de couleur rouge, verte ou bleue pour ouvrir les portes. On a même droit à un certain William Blazkowicz en guise de clin d’œil à Wolfenstein.
Voilà ce qu'il reste du l'équipe du film après une séance test en compagnie des fans des jeux vidéo...
Au final, Doom Annihilation est un navet opportuniste qui masque son indigence par quelques références grossières et maladroites. L’histoire a beau se calquer sur le précédent métrage et certains jeux vidéo de la saga, il n’y a rien que l’on puisse apprécier. L’atmosphère propre au contexte est inexistante, tandis que la science-fiction horrifique n’est jamais assimilée au film. On pourrait également s’attarder sur la pauvreté du bestiaire ou de l’arsenal ou même dénoncer une caractérisation aussi plate que la narration. S’il y a une certaine constance et variété dans cette pathétique production, elles se situent dans ses défauts. Au lieu de fournir un effort notable et éventuellement référentiel à l’œuvre d’ID Software, on se retrouve avec un rail-shooter décérébré. Un comble quand on s’attaque à un monument du FPS! Bref, le responsable de Soccer Dog (piètre référence) est incapable d’exploiter le matériau de base à sa juste mesure.
Un film de Tony Giglio
Avec : Amy Manson, Louis Mandylor, Dominic Mafham, Luke Allen-Gale