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Elfen lied

Un design soigné, une animation sans faille, des protagonistes aussi profonds que dissemblables, voilà un manga qui restera dans les mémoires. Le récit dispose d'une narration rythmée et savamment orchestrée où l'on se plaît à une réflexion sur la nature humaine et l'intolérance. Gore, violent, amusant, émouvant, Elfen lied est une oeuvre incontournable.
Publié le 17 Septembre 2012 par Dante_1984Voir la fiche de Elfen lied
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Lucy, une jeune fille aux pouvoirs télékinétiques effrayants, s'échappe d'un laboratoire où elle subissait de terribles expériences. Elle échoue sur une plage et se retrouve recueillie par Kota et Yuka, deux amis d’enfance qui viennent d'emménager dans une ancienne auberge. Lucy semble ne se souvenir de rien. Pourtant, Kurama, responsable des recherches, dépêche une équipe des forces spéciales pour la ramener « chez elle ».

Adaptation du manga éponyme, Elfen lied amorce son histoire avec un générique assez surprenant. En temps normal, on ne s'y attarderait pas plus que cela, mais celui-ci mérite bien qu'on lui consacre quelques mots et montre à quel point le concept de la dualité sera présent au fil des épisodes. « Os iusti meditabitur sapientiam » telles sont les premières paroles du thème principal : Lilium. La consonance religieuse est indéniable, sa signification ôte tout doute et le ton empreint de douceur envoûte littéralement sur fond des oeuvres de Gustave Klimt où se mêlent habilement les protagonistes d'Elfen Lied. D'emblée, on sent un parti pris évident pour la singularité d'un style à la fois épurée et inspirée.


On refait la déco.

Succède à l'harmonie de la mélodie, la violence des premières images. Un bras arraché qui s'agite encore de derniers soubresauts. Les cris fusent. Les armes crachent les balles. Le contraste est saisissant. L'impact sur le spectateur s'en veut plus surprenant. La séquence d'évasion est brutale et n'hésite pas à surenchérir dans le gore en s'amusant à torturer les malheureux gardes. Des membres disloqués qui peinent à se rompre, des amputations foudroyantes, tout cela, sans que rien n'atteigne Lucy, forment une angoisse palpable. Tant par sa violence graphique que par les thématiques abordées (nous y reviendrons plus tard) ou le ton donné à l'histoire, Elfen lied s'adresse avant tout à un public averti.

Là encore, la suite nous prend à contrepieds. Derrière le masque de fer à la silhouette aguicheuse, l'on s’attendait à une jeune demoiselle impitoyable et, sur les bords de la plage, l'on découvre une enfant (dans un corps de femme). Lucy est pétrie de contradictions. Par conséquent, on ne parvient pas à saisir ses véritables motivations. Sa personnalité se veut à la fois établie, voire redoutable (les moments de « lucidité ») et fragile (lorsqu'elle est Nyu) où l'insouciance se mêle à l'innocence. Rarement, on aura eu droit à un personnage aussi fort et attachant. Qui plus est, les autres protagonistes sont tout aussi soignés et semblent cacher une part de mystères dans leur passé. C'est donc une palette de caractères non seulement crédibles que l'on nous offre, mais complexes. Une psychologie profonde des plus fascinantes.


Nyu ?

D'ailleurs, le character-design s'en veut le parfait représentant. Des physiques marqués qui traduisent (trahissent) une partie des sentiments éprouvés par chacun. Les diclonius sont reconnaissables grâce à leurs cheveux roses et leurs cornes. Les membres du laboratoire abhorrent un faciès froid, imperceptible. Tandis que les humains s'avèrent plus conventionnels dans le sens où ils ne connaissent pas les véritables enjeux. On les assimile alors à l'ignorance que confère une innocence presque infantile. Qu'il s’agisse de Kota, Yuka ou Mayu, ils se retrouvent entre deux âges, là où les doutes et les interrogations fusent. De ce côté, on sent également un travail acharné pour nous fournir une vision cohérente de l'histoire et des personnages.

En ce qui concerne le graphisme en lui-même, on frôle le sans-faute. Bien que je n'ai trouvé aucun défaut majeur, la perfection n'est pas de ce monde, mais Elfen lied la touche des doigts. On remarquera l'emploi d'un trait précis où les décors aux couleurs chatoyantes sont mis en valeur avec une justesse bluffante. La ville de Kamakura a fait l'objet d'une reconstitution absolument sublime. La plage, les ruelles, le pont de l'île d'Enoshima ou l'escalier qui permet d'atteindre le sanctuaire de Sasuke Inari, l'ensemble dépeint une ville théâtre d'événements extraordinaires et demeure, cependant, dans un certain traditionalisme. En somme, une représentation condensée et mesurée de la diversité du Japon. À noter, quelques flashbacks aux tons sépia à la hauteur du reste. En un mot comme en cent : sublime.


Attention où vous mettez les doigts !

Devant cette débauche purement contemplative, l'on serait en droit de se demander si l'histoire vaut le détour. Pas de souci à se faire, entre originalité et introspection sur la nature humaine, les amateurs de réflexions philosophiques tant que les inconditionnels de combats rondement menés seront comblés. Les diclonius sont assimilées à un fléau étant donné la dangerosité de leurs pouvoirs. Pourtant, le passé de Lucy et de Nana nous montre qu'elles sont avant tout des victimes de la bêtise humaine. En cause : leurs différences (qui font également leur richesse et non leur handicap). Par conséquent, les véritables monstres ne sont pas ceux que l'on croit être. Les expérimentations sur les diclonius étayent un peu plus le sadisme inhérent à notre espèce et justifient le comportement des diclonius.

Derrière ce propos, le spectateur ressent une multitude de sentiments aussi contradictoires que la personnalité névrosée de Lucy. Joie, tristesse, aversion, tendresse. Petit à petit, l'on est impliqué dans cette histoire émouvante qui relève tant du drame que de l'horreur. Bien sûr, l'on pourrait citer d'autres genres (le thriller ou la science-fiction par exemple) qui parsèment les lignes du scénario. Les ramifications sont tellement nombreuses, tellement inspirées qu'il serait difficile de tous les énumérer. Des influences certes, mais tournées au bénéfice d'un récit captivant du début à la fin. On a l'a vu plus tôt, les peintures de Klimt, le thème Lilium ou les diverses connotations montre une culture générale riche et omniprésente.


“J'ai trouvé de beaux coquillages ! »

Elfen lied est une démonstration magistrale du talent des Japonais pour les animes. À la fois beau et profond, ce manga divertit aussi bien qu'il pose les problèmes de la discrimination, de l'intolérance et, plus globalement de la nature humaine. Des propos sans concession, intelligents et surtout bien amenés. Des graphismes inspirés, des personnages attachants, un récit fascinant, difficile de ne pas se perdre en superlatifs lorsque l'on parle du manga de Lynn Okamoto. La dualité est au coeur de l'intrigue (schizophrénie, violences...). Ce qui en découle ne laisse pourtant pas de place au doute. Nous en sommes en présence d'une oeuvre bouleversante nantie d'une portée stupéfiante.

A propos de l'auteur : Dante_1984
Portrait de Dante_1984

J'ai découvert le site en 2008 et j'ai été immédiatement séduit par l'opportunité de participer à la vie d'un site qui a pour objectif de faire vivre le cinéma de genre. J'ai commencé par ajouter des fiches. Puis, j'ai souhaité faire partager mes dernières découvertes en laissant des avis sur les films que je voyais.

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Elfen lied
Réalisateur:
Durée:
13 x 25 min
7.4
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