Voir la fiche complète du film : Lèvres de Sang (Jean Rollin - 1975)
[[

Lèvres de Sang

Lors d'une soirée mondaine, Frederic tombe par hasard sur une photographie de ruines, qu'il croit connaître. Lèvres de Sang peut être considéré, à juste titre, comme l'un des meilleurs films du réalisateur, plus accessible que bon nombre de ses autres expériences.
Publié le 3 Octobre 2013 par GORE MANIACVoir la fiche de Lèvres de Sang
8
Cimetière

Lors d'une soirée mondaine à Paris, Frederic tombe par hasard sur une photographie de ruines, qu'il croit connaître. Obsédé par cette image, il est alors assailli de souvenirs remontant à son enfance, et d'une somptueuse femme pâle en particulier.

Depuis son premier film, Le Viol du Vampire, en 1968, Jean Rollin reste fidèle à une même ligne de conduite, qu'il ne quittera presque jamais jusqu'à sa mort, à savoir un univers baroque, surréaliste et lyrique, dans lequel se croisent des personnages isolés et tortueux.
Son personnage fétiche, la femme vampire, se retrouve à nouveau au centre de toutes ses attentions dans Lèvres de Sang.

Au casting, il renoue avec Jean-Loup Philippe (co-auteur de ce film), déjà entrevu dans son premier métrage, les jumelles Castel (premières égéries de Rollin avant sa rencontre avec Brigitte Lahaie), ainsi que la célèbre actrice de charme Claudine Beccarie (Elsa Fräulein SS). Cette profusion d'actrices "spécialisées" n'est pas une première pour Rollin qui, à partir de cette période, doit se résoudre à réaliser des films érotiques et pornographiques afin de financer ses projets personnels.
D'ailleurs, Lèvres de Sang connaîtra un montage classé X, sorti un an plus tard, rebaptisé pour l'occasion Suce moi Vampire, et tourné avec la même équipe, afin d'amortir le manque de rentabilité du premier métrage.

A l'heure où la Hammer subit la concurrence de films d'horreur plus "visuels", tel l'Exorciste, il est certain que le fantastique suggestif de Rollin peine à rencontrer son public. Pourtant, Lèvres de Sang marque un premier tournant dans la carrière de l'auteur, qui impose plus de rythme à sa mise en scène et davantage de clarté narrative.
Rollin délaisse ainsi les longues scènes muettes de ces débuts au profit d'un suspense bien installé, même si la nostalgie y est plus présente que jamais (conf les rôles octroyés aux soeurs Castel et la scène du cinéma). Pour autant, le cinéaste conserve ses thématiques de prédilection : décors funestes (le cimetière, les ruines et sa fameuse plage), personnages sombres et insondables (les quatre vampires), lieux interlopes...

Malgré quelques lenteurs et un côté horrifique aujourd'hui bien désuet, les nostalgiques d'un certain cinéma désormais disparu ne trouveront pas le temps long devant cette déclaration d'amour à un monde fantastique d'un autre temps. Disposant de budgets réduits, Rollin ne peut pas toujours soigner les détails.
Toutefois, les séquences nocturnes sont superbement filmées et Jean-Loup Philippe est plutôt convaincant dans le rôle d'un homme tourmenté, emprisonné dans un passé qu'il a volontairement mis de côté à la mort de son père. Face à lui, Annie Belle (la Maison au Fond du Parc) attire l'attention, avec un jeu sobre et un certain magnétisme.

Comme tout au long de sa filmographie, le vampirisme vu par Rollin est féminin et érotique. Chaque morsure ressemble surtout à un long baiser mortel, sans doute une façon d'adoucir sa vision de la Mort, celle-ci étant traitée ici de manière sommaire mais aussi éthérée (conf le meurtre de la photographe, voire celui du gardien du cimetière, interprété par Rollin en personne).

L'épilogue, loin d'être ordinaire pour l'époque (la différence est alors salvatrice, et permet de s'éloigner d'un monde que le cinéaste n'apprécie guère), reliera finalement ce métrage aux précédents par sa mélancolique poésie.

Pont entre deux périodes importantes de sa carrière (ses débuts dès 1968, puis sa période la plus gore, qu'il initiera dix ans plus tard avec les Raisins de la Mort), Lèvres de Sang peut être considéré, à juste titre, comme l'un des meilleurs films du réalisateur, plus accessible que bon nombre de ses autres expériences, tout en conservant ce lyrisme intemporel propre à son auteur.
Il est également le point de départ idéal pour tout cinéphile souhaitant découvrir l'atmosphère unique d'un cinéaste à part dans le paysage cinématographique français.

A propos de l'auteur : GORE MANIAC
Portrait de GORE MANIAC

J'essaie de partager ma passion pour un cinéma méconnu, mais qui mérite incontestablement qu'on s'y arrête !

Autres critiques

The Devil Inside
Isabella est hantée par le massacre que sa mère a commis voilà vingt ans. Elle décide d'effectuer un reportage sur les exorcismes pour démêler les fantasmes de la réalité et surtout savoir si sa mère est folle à lier ou possédée par une entité démoniaque. Après s'être essayé aux joies des conséquences d'un jeu vidéo basé sur la vie de la comtesse Bathory (!), William Brent Bell signe...
Killer Mountain - Les Roches Maudites
Au vu de sa filmographie, Sheldon Wilson apprécie particulièrement le survival animalier, comme le démontre Kaw ou Carny . Des métrages modestes, perfectibles par leur moyen, qui réussissent néanmoins à se distinguer de la masse putride des DTV et autres ignominies inhérentes au genre. À l’évocation du réalisateur, on s’attend donc à un traitement relativement honnête compte tenu du...
Flashback
Ah l'Allemagne, ses bières, ses grosses blondes, sa chancelière si sexy, et bien sûr le Rock am Ring. Mais ce n'est pas tout, le pays teutonique a aussi son lot de films d'horreur : on se souvient encore par exemple de la souffrance ressentie en regardant Blood Trails , slasher avec un tueur en vélo qui arrive à égorger un type avec les pignons crantés de son engin sans tomber de...
Good Omens
Pour un roman, comme pour un film, s’atteler à un sujet aussi codifié et surexploité que l’Apocalypse relève de la gageure. Entre certaines occurrences indissociables du thème et la multitude de manières de présenter cette « fin du monde » annoncée, il est difficile de trouver le bon angle d’approche. Au début des années 1990, Neil Gaiman et Terry Pratchett...
Tucker & Dale fightent le mal
Depuis plusieurs mois déjà, Tucker & Dale Fightent le Mal , réalisé par Eli Craig et écrit en collaboration avec Morgan Jurgenson , fait le buzz sur la Toile. Il faut dire qu'avec un titre pareil et une affiche bien dans le ton, il est impossible de ne pas se sentir intrigué par ce film qui fleure bon la déconne, la tripaille et la parodie de genre. Un exercice ambitieux, bien souvent...

Thématiques