Skinwalkers
Après une période de vache maigre, le loup-garou est revenu sur le devant de la scène par le biais de la saga Underworld. Depuis, le lycan tente tant bien que mal de suivre cette voie du renouveau en apportant de nouvelles caractéristiques à son mythe, à la base autant bestial que basique.
Ancien directeur de photographie passé derrière la caméra, James Isaac avait signé la plus décapante des aventures de Jason Voorhees il y a quelques années (Jason X), pouvant laisser espérer quelques espoirs à tout fan d'épouvante qui se respecte. Néanmoins, sa variation sur le mythe lycanthropique n'a rien de transcendant.
Après une explication manichéenne sur la raison d'une rupture entre les deux clans de loups-garous (l'un aime cette condition de chasseur, l'autre tente de la contenir par tous les moyens), Isaac nous plonge dans le quotidien des héros, n'évitant pas les poncifs et les longueurs, seule la plastique de Nastassia Malthe nous empêchant de sommeiller durablement et d'omettre que ces lycans ressemblent plus à des bikers qu'à des créatures maudites.
On comprend rapidement qu'un gamin, né de l'union entre une humaine et un skinwalker désormais passé du côté obscur, sera l'enjeu d'une course poursuite poussive et répétitive, sorte de course à l'australienne grandeur nature qui s'achèvera dans un hangar désaffecté.
Davantage tourné vers l'action (le shotgun dans la petite ville) que vers le fantastique pur et dur, ce film tente donc d'apporter un mélange des styles, entre le road-movie cher aux américains, avec son lot de routes désertes et ses motards, la romance impossible (entre la mère de l'enfant et son ex-mari, désormais chargé de tuer son fils), et un côté fantastique tout de même, même si les lycans d'Isaac ressemblent plus à des hommes de Cro-Magnon qu'à des loups-garous dignes de ce nom.
La mode actuelle à propos des films sur les lycans est en fait de les opposer, tentant ainsi de leur offrir un visage plus humain en leur donnant également le beau rôle. Comme avec Le Goût du Sang, qui revenait à l'origine du mythe (il s'agissait de vrais loups, comme dans Wolfen), Skinwalkers tente aussi de modifier les composantes du monstre, en changeant par exemple son apparence, plus humaine, moins effroyable donc.
Hollywood tente donc de domestiquer et de rendre plus politiquement correct ces créatures, comme Twilight rationnalisait et adoucissait le vampire. Dès lors, le loup-garou devient presque inoffensif, comme un pitbull castré à la naissance, aseptisé par l'Amérique puritaine qui n'ose même pas imaginer une scène de copulation lycanthropique dévoilée nettement dans le cultissime nanar bis qu'était Hurlements II.
Isaac, devenu définitivement un réalisateur de commande décérébré, poussera la crétinerie jusqu'à nous faire avaler un épilogue d'une rare indigence, dans lequel treize années semblent s'effacer en l'espace de quelques secondes, afin de répondre positivement au sacro-saint happy-end, désormais associé à la préparation de la suite imposée d'office en cas de succès par nos chers producteurs.
En espérant un jour un retour aux sources pour notre bête à poil préférée du cinéma d'épouvante, qui est avant tout un prédateur sanguinaire et impitoyable, régi par des instincts primitifs qui renvoyaient à la dualité de l'être humain, force est de constater que Skinwalkers sera probablement le produit formaté type dans lequel sera exposé le loup-garou durant les prochaines années, devenant animal de compagnie en laisse pour un public pop corn.