Le Livre d'Eli

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Portrait de Killafornia Killafornia
Graine de psychopathe - 208 critiques
publié le 18/02/2010 - 14:52
10
 

Mon avis

Les jumeaux Albert et Allen Hugues, véritables artisans d’un cinéma identitaire à qui l’on doit les chefs d’œuvres que sont « Menace II Society » et « Dead Presidents » ainsi que l’excellent film de commande qu’est « From Hell » reviennent avec « The Book of Eli », fantasme post-apocalyptique narrant le chemin sacré d’Eli jusqu’à la terre promise. Traitant ainsi de la religion en l’état d’une nitroglycérine difficilement manœuvrable, source indubitable de toutes discussions et idéologies. Discours acerbe mais qui se vérifie de jour en jour de par les conflits qu’elle provoque. Le long métrage n’est cependant pas une dénonciation de la religion mais soumet le spectateur à la vision des interprétations et desseins dissemblables selon ses interprètes, résurgence permanente de conflits entre les pensées antagonistes de ce monde. Effectivement, l’histoire et les erreurs humaines tentent à se répéter peu importe la transposition temporelle. Propos puissant, même si devenu commun, et ce quoi qu’en disent les sois disant progressistes et hypocrites qui pullulent sur notre globe comme en témoigne certaines vives critiques cinés à l’encontre du métrage promptement gerbantes et inintéressantes (voir emplis de raisonnements fallacieux) tombant dans les poncifs et clichés de l’ignorance de l’athée primaire.

Ne s’arrêtant pas la, l’œuvre est pourvue de nombreux ressorts cinématographiques. Si les frères Hugues entremêlent l’abondance de références aux films post-nuke à travers l’incorporation d’un monde libertaire et d’un dictat pillard, meurtrier voir cannibale propre au genre, comme dans nombres de films de cet embranchement, ce retour social et anticonstitutionnel à un mode de vie qui nous parait archaïque évoque les temps immémoriaux d’un Far West enivrant de son rayonnement amoral les peuplades de l’époque. Ajoutons à cela la beauté d’une photographie substantielle à l’essence même du long métrage à l’aide de renfort de dessinateurs accentuant le style très graphique et permettant l’immixtion formelle de références à la toute puissance d’une religion dogmatique dans les rouages d’une société civilisée – Denzel Washington portant l’ornement auréolaire d’un apôtre diffusant la parole de Dieu -, propos premier du film, c’est à un melting-pot de genre que l’on nous convie.

Les différents plans permettent de mettre en exergue les trognes boursouflées des hommes soumis aux conditions atmosphériques et géographiques qu’ils se sont eux même créés lors de la dernière guerre il y à trente ans. Exactement à la manière introduite par Sergio Leone lors de ses fulgurants westerns, références ultimes du genre à travers le 7ème art. Evitant le piège des acteurs aux faciès trop lisses et d’un formatage d’interprétation trop expéditif, les frères Hugues convoquent une pléthore de grands noms : Denzel Washington d’abord, fustige le spectateur de tout le talent qu’on lui connaît. D’un professionnalisme toujours aussi étendu, l’acteur n’a pas hésité à suivre des cours d’arts martiaux avec Dan Inosanto et à assuré lui-même toutes ses cascades. Gary Oldman est mémorable dans le rôle de Carnegie, sorte de dictateur et digne représentant de la perversité de l’âme accouplée à l’insatiable soif de pouvoir. Ray Stevenson en second couteaux sifflant du Morricone est remarquable et les apparitions de Michael Gambon, Malcolm McDowell ou encore de Tom Waits sont d’une grande justesse. A travers ce défilé de trogne perce le rayon de lumière Mila Kunis, dont les traits et le faciès non jamais été aussi bien mis en avant. Plus belle que jamais et malgré un rôle secondaire à la psychologie parfois un peu trop limitée, elle crève littéralement l’écran de sa présence.

Autre composante majeure du métrage : l’environnement. La terre est désormais un désert ininterrompu, sorte d’enfer de l’assèchement où quasi tous les points d’eaux ont taris et ou les quelques dernières sources d’eau à l’intérieur des terres son commercialisées à prix d’or. Un climat faisant office de châtiment que se sont imposés les hommes lors d’ultimes divergences religieuses. Un trou dans la couche d’ozone à été formé, la plupart des vies ont été radiées et la terre à perdu sa fertilité. Le film propose plus subliminalement une vision corollaire à la simple désagrégation de l’humanité, en quelque sorte il évoque un jugement divin fatidique qui frappe la cupidité et les pécheurs. Les longues étendues sablées du film prennent forme dans le désert du Nouveau Mexique et les quelques traces de fertilité sont gommée à l’ordinateur pour imposer ce constat apocalyptique. Heureusement, Albert et Allen Hugues évitent les sujets prosaïques comme les solutions écologiques, prenant exclusivement le parti pris d’un Eden à l’Ouest en attente du savoir biblique comme référence à une terre promise et fertile se dessinant ironiquement derrière les barreaux d’Alcatraz.

En bref, « Le livre d’Eli » se veut une revisite du post-nuke et si il ne s’incombe pas de renouveler le genre, il en offre une déclinaison religieuse assez surprenante et diablement efficace.

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