Les Yeux sans Visage

Un film français qui explore l'horreur au travers du prisme de la science car ici il s'agit d'un brillant chirurgien, le professeur Génessier, qui cherche à redonner un visage à sa fille en recourant aux kidnappings de jeunes femmes auxquelles ils prélèvent les visages au travers d'un procédé chirurgicale assez réaliste visuellement pour l'époque. 

On peut déjà parler ici d'une révolution cinématographique française de l'horreur car George Franju est le premier à pousser aussi loin les barrières de la violence esthétique, on a tout de même un homme sensé aider les gens qui arrache au sens littéral leur identité à des jeunes femmes innocentes, le fait de participer visuellement à ces opérations offre un malaise insoutenable. 

On notera ici une police dépassée par les événements et qui n'hésitera pas à mettre en péril la vie d'une jeune femme dans le seul espoir d'attraper le criminel, donnant un portrait peu flatteur de cette même police. 

Ce qui frappe avant tout c'est la complicité du chirurgien avec son assistante, on pourrait presque y voir une romance platonique dans leurs échanges, beaucoup plus du côté de l'assistante.

Celle-ci sait d'ailleurs se montrer efficace dans la capture de leurs proies, sachant manier séduction et manipulation envers des jeunes femmes naïves. Elle est néanmoins un personnage nuancée qui fait ce qu'elle fait par devoir et remet souvent en cause ses actes. Elle est aussi une figure quasi-maternelle pour la fille du professeur, rendant sa fin d'autant plus tragique. 

Le professeur Genessier est l'image même du scientifique fou prit dans son obsession de redonner un visage à sa fille. Toute l'ambiguïté du personnage porte sur sa volonté réele ou supposé d'aider son enfant ou de réussir l'impossible. Il ne prend aucun compte des victimes, se montre d'un pragmatisme froid et méthodique, ne se remet jamais en cause et torture des animaux dans sa quête. On peut dire que sa fin est à la hauteur de ses crimes. 

Christiane est l'élément tragique, la fille malheureuse de Génessier qui n'a pour seule identité que son masque et qui devient malgré elle l'objet de toutes les expérimentations, pour des résultats catastrophiques et un désespoir qui monte crescendo tout au long du récit. La fin du film témoigne de cette detresse qui se traduit par une violence soudaine, terrible et libératrice. 

Au-delà de ce trio phare du film, il faut aussi compter une musique tantôt expressive tantôt poétique qui témoigne efficacement des actes et émotions du moment. 

La maison offre aussi un excellent contraste avec les horreurs qui y sont commises. 

Un très bon film qui témoigne d'une force visuelle et expressive extraordinaire pour l'époque. Un film à voir une fois dans sa vie car c'est un grand moment du cinéma français.