Voir la fiche complète du film : Paranoiaque ! (Freddie Francis - 1963)
[[

Paranoïaque

Alors qu'elle assiste à une messe en l'honneur de ses parents et de son frère disparus, Eleanor Ashby pense reconnaître son défunt frère dans l'église. Paranoïaque fait partie de ces petites perles noires oubliées qu'il est de bon ton de reconsidérer à sa juste valeur, à mi-chemin entre les Diaboliques de Clouzot et les Innocents de Clayton.
Publié le 19 Décembre 2017 par GORE MANIACVoir la fiche de Paranoiaque !
8

Attention, cette critique contient quelques spoilers.

Alors qu'elle assiste à une messe en l'honneur de ses parents et de son frère disparus il y a près de dix ans, Eleanor Ashby pense reconnaître son défunt frère dans l'église. Sa tante et son frère, persuadés qu'elle perd la raison, ne la croient pas.

Faisant partie des meilleurs scénaristes de la Hammer, Jimmy Sangster s'oriente vers le thriller dès le début des années 60. Une aubaine pour la firme britannique, toujours ouverte à de nouveaux challenges. Après Hurler de Peur (1961), il puise son inspiration dans une nouvelle de Josephine Tey pour Paranoïaque. Chef opérateur virtuose récompensé par deux oscars, Freddie Francis n'en est qu'au début d'une belle carrière de réalisateur lorsqu'il est retenu pour ce film. Sa collaboration avec Sangster, qui s'étendra sur plusieurs thrillers, constituera l'un des points d'orgue de sa cinématographie.

Initialement prévu pour un tournage en couleurs, Paranoïaque a été magistralement sauvé de cette lubie par le tandem Sangster-Francis, bien décidé à conserver l'étiquette glauque et froide du film noir. Confiée à l'excellent Arthur Grant, qui oeuvra régulièrement pour la Hammer (les Vierges de Satan, l'Invasion des Morts-Vivants), la photographie constitue l'un des points forts du film. Très soignée, jouant sur des jeux de lumière mettant en avant la noirceur des protagonistes et sur les zones d'ombre d'un scénario bien agencé, elle joue un rôle capital en nous immergeant pleinement dans ce délicieux casse-tête.

1

Pour l'une de ses premières réalisations, Francis installe un climat délétère qui ne va cesser de se déliter, à l'image d'un Oliver Reed qui écrase l'ensemble du casting de sa présence animale et magnétique. Au départ simple bourgeois cynique et alcoolique, il sombre petit à petit dans une spectaculaire folie furieuse. Dans un rôle sur-mesure (le comédien était réputé pour ses nombreuses frasques), Reed signe sans aucun doute sa meilleure prestation pour les studios Hammer, égalant des Brando et autres Kinski dans un final de haute volée.

Bande-Annonce

Face à un aussi infernal talent, il semble difficile d'exister pour les autres comédiens, du très effacé Alexander Davion (Tony) à la jolie Janette Scott (Eleanor), même si Sheila Burrell cultive l'ambiguïté dans le rôle de la tante Harriet. Sa relation avec son neveu névrosé s'avère aussi troublante que celle entre Eleanor et Tony. Pensant retrouver son frère, qu'elle croyait mort huit ans plus tôt, elle finira par sombrer dans l'inceste après avoir flirté avec le suicide. Ces multiples tensions et liens sordides au sein de cette famille, rarement évoqués au cinéma, constituent l'un des points d'orgue d'un scénario macabre à souhait.

1

Après des doutes vite levés sur l'identité de Tony, on s'intéressera au sort subi par l'adolescent en question. Sombrant dans un climat quasi gothique qu'aurait apprécié Edgar Poe, Paranoïaque s'achève dans un incendie salvateur, souvent utilisé dans les productions Hammer pour en finir avec le monstre du film. Un monstre à visage humain, ici, pourtant tout aussi effrayant que les vampires et autres créatures démoniaques illustrant souvent les célèbres studios britanniques.

Distribué en Blu-Ray par l'éditeur Elephant Films depuis près d'un mois, avec une dizaine d'autres productions Hammer (dont l'excellent Meurtre par Procuration, également composé par le duo Francis-Sangster), Paranoïaque fait partie de ces petites perles noires oubliées qu'il est de bon ton de reconsidérer à sa juste valeur, à mi-chemin entre Les Diaboliques de Clouzot et Les Innocents de Clayton.

A propos de l'auteur : GORE MANIAC
Portrait de GORE MANIAC

J'essaie de partager ma passion pour un cinéma méconnu, mais qui mérite incontestablement qu'on s'y arrête !

Autres critiques

La Mort au bout du fil
Je dois bien vous l'avouer: je n'attendais pas grand chose de ce film. A ma décharge, il faut reconnaître que les thrillers médiocres, sans envergure et plus efficaces qu'une boîte de somnifères sont aussi nombreux que les points noirs sur le front d'un adolescent. Donc, en mettant Mort au Bout du Fil dans le lecteur, je m'attendais à passer 1h30 devant une histoire mille fois...
The Witch
Si la sorcellerie a nourri nombre de fantasmes à travers les siècles, le cinéma a tôt fait de s’en approprier les grandes lignes. Sous l’angle de l’horreur, du drame, de la comédie ou du fantastique, le thème s’est décliné sous toutes les coutures, quitte parfois à sombrer dans la médiocrité. Pour autant, contes et légendes possèdent une aura particulière propre à...
Battleship Pirates
Il y a différentes façons d'être étonné par un film. Le mieux reste d'être épaté par le talent, la mise en scène ou encore l'intelligence du scénario. Mais très souvent, on se retrouve face à des films qui laissent un arrière-goût amer, celui de s'être fait prendre pour un débile profond. Scénarios indigents, acteur au rabais, effets spéciaux, très spéciaux, mise en scène calamiteuse, les raisons...
Häxan - La sorcellerie à travers les âges
Au même titre que le vampire, la sorcière est une figure emblématique du cinéma de genre. Tour à tour tournée en dérision dans des comédies familiales, objet de répulsion pour certains films d’horreur, représentation glamour à travers des récits romanesques plus ou moins contemporains... Le sujet a été exploité sous toutes ses formes, quitte parfois à perdre de vue son origine historique et...
Alcatraz
Alcatraz a déjà été la figure de proue du monde cinématographique. On songe notamment à Rock, Meurtre à Alcatraz ou L'évadé d'Alcatraz pour ne citer que les plus connus. Hormis des séries telles que Prison break ou Oz, l'univers carcéral est assez peu usité à la télévision. Aussi, le mariage de la célèbre prison sur un support qui permet une certaine largesse (surtout sur la longueur...
Paranoiaque !
Réalisateur:
Durée:
80 min
8
Moyenne : 8 (1 vote)

Thématiques