BIFFF 2025 - Brussels International Fantastic Film Festival
Découvertes internationales, avant-premières et hommages... Geoffrey nous fait partager ses retours de projection.
Dead Talents Society (2024)
Synopsis
Des fantômes s'efforcent de devenir les stars du Net grâce à leurs performances effrayantes parmi les vivants afin de devenir des légendes urbaines...
L'Avis de Geoffrey
Chainsaws Were Singing (2024)
Synopsis
Un tueur maniant une tronçonneuse sème le chaos à travers la campagne estonienne... le tout en chantant.
L'Avis de Geoffrey
OK, on tient peut-être là le plus grand délire du BIFFF 2025 : CHAINSAWS WERE SINGING, un film d’horreur musical estonien, fauché, mal foutu, parfois moche… mais absolument irrésistible.
Imaginez Massacre à la tronçonneuse remixé par les Monty Pythons, avec des chansons sur fond de sang, de tripes et de gags absurdes. Voilà. C’est ça. Et étonnamment, ça fonctionne.
Le film part dans tous les sens — entre les deux auto-stoppeurs paumés, l’héroïne en cavale, un tueur à la tronçonneuse qui fait le plein à la station-service comme si de rien n’était, et les flics encore plus idiots que dans un film de Luc Besson. C’est souvent bancal, Les cadrages sont approximatifs, les zooms intempestifs, le montage est aux fraises, l’image est cradingue, mais cette esthétique à l’arrache donne un aspect presque naturaliste au tout, ce qui rend certaines scènes d’autant plus dérangeantes.
Le film est bourré de bonnes idées, de moments absurdes qui font mouche et, pour couronner le tout, les chansons sont franchement chouettes. Le repas de famille cannibale évoque évidemment Massacre à la tronçonneuse, mais le clin d’œil est bien digéré (sans mauvais jeu de mots). Et puis il y a ce passage avec une secte bukkake, totalement gratuit… et sans doute de trop, même dans un film qui se veut aussi WTF. Personnellement, j’aurais coupé cette péripétie car elle alourdit une œuvre qui pêche un peu par excès de générosité.
Mais allez, cette lettre d’amour aux films d’exploitation bricolés avec rien (sauf une passion évidente) a tout du futur film culte que l’on se refilera entre initiés pendant des années.
CHAINSAWS WERE SINGING n’est sans doute pas pour tout le monde, mais si vous aimez le cinéma qui ose tout, jusqu’au mauvais goût total, alors vous tenez là un petit bijou d’outrance et d’anarchie filmique.
The Ugly Stepsister (2025)
Synopsis
Elvira doit rivaliser avec sa demi-sœur d'une beauté insensée...
L'Avis de Geoffrey
Avant toute chose, il faut savoir que THE UGLY STEPSISTER, c’est une relecture de CENDRILLON du point de vue de l’une des belles-sœurs. Mais oubliez les paillettes, les souris qui chantent et la citrouille magique : le film d’Émilie Blichfeldt prend le conte de fées à contre-pied, le découpe au scalpel et vous le sert saignant. Ici, pas question de marier l'amour et la magie : tout tourne autour de la cruauté, du paraître et du malaise.
Rebekka, la marâtre ruinée, n’a plus qu’un plan pour sauver les meubles : caser une de ses filles avec le prince. Pas question de laisser cette tâche à la petite Cendrillon. Non, son choix se porte sur Elvira, qu’elle est prête à reconstruire - littéralement - pour la rendre désirable à travers des scènes de chirurgie esthétique bien crades.
Mais The Ugly Stepsister, ce n’est pas juste un choc visuel : c’est aussi un film riche en sous-texte. Il y a une critique acérée des diktats de la beauté, du patriarcat, de la société de façade et de la fanatisation romantique. Elvira fantasme un homme qu’elle ne connaît même pas, simplement parce qu’il incarne un idéal fabriqué à partir de son art (le prince est aussi un poète publié dans cette version).
Techniquement, c’est très bien réalisé, viscéral, glaçant, et porté par d’excellents interprètes excellentes. On ne ressort pas forcément traumatisé de THE UGLY STEPSISTER, mais avec quelque chose de désagréable coincé zu fond de la gorge, et c’est bien le but.
The Surfer (2025)
Synopsis
Un homme revient sur la plage de son enfance pour y surfer avec son fils, mais un gang local les menace...
L'Avis de Geoffrey
Je vais être honnête : j’attendais beaucoup de The Surfer. La bande-annonce me vendait un Cage vénère face à une bande de surfeurs toxiques, le tout dans un décor brûlant façon western des plages. Bref, je m’attendais à un retour du Cage version Les Ailes de l’Enfer, avec une touche de John Wick sous les palmiers.
Sauf que pas du tout.
Au lieu d’un actioner musclé, on a droit à une lente et étrange descente aux enfers, en short sur un parking, avec du sable dans les chaussures et des hallucinations plein la tête. Et quelque part, quand on se rappelle que c’est Lorcan Finnegan, le réal de l’excellent - et bien barré - Vivarium, derrière la caméra, on aurait dû s’en douter.
Alors oui, je suis un peu déçu, mais aussi intrigué. Parce que le film, malgré ce qu’il n’est pas, est très bien foutu : une réalisation léchée, une ambiance étouffante, une plongée dans la folie qui fonctionne à fond. C’est juste que… ce n’est pas ce à quoi je m’attendais. Du coup, sentiment mitigé.
Il faudra sans doute un deuxième visionnage pour bien digérer ce mélange étrange de commentaire social, de trip psychédélique et de western moderne. Mais une chose est sûre : Nicolas Cage est en grande forme. Il livre ici une performance taillée pour lui, oscillant entre vulnérabilité et rage mystique.
Bref, The Surfer, ce n’est pas le film que j’attendais, mais c’est clairement un objet de cinéma intriguant et réussi dans ses intentions.
A Girl with Closed Eyes (2025)
Synopsis
Deux femmes (la principale suspecte et une policière) se retrouvent suite au meurtre d'un auteur de best-sellers...
L'Avis de Geoffrey
Halalala, première déception de cette année avec ce thriller coréen très attendu (le ciné 2 du BIFFF était plein à craquer), mais qui souffre de grosses lacunes scénaristiques et rythmiques, et, de fait, n’a pas tout à fait été à la hauteur des attentes. Pourtant, sur le papier, tout était là : un écrivain célèbre abattu après une séance de dédicaces, une femme qui avoue le meurtre en affirmant que le roman est inspiré de son propre enlèvement, et une policière qu’elle seule accepte de voir…
Visuellement, le film est très réussi. La mise en scène est soignée, la photographie élégante, et la tension est là, par moments. Mais le scénario touffu finit par se tirer une balle dans le pied. L’intrigue devient confuse, certains rebondissements paraissent mal amenés, et le rythme souffre de longueurs qui plombent l’ensemble.
Ce n’est pas un mauvais film, loin de là, mais il manque de clarté et de nerf pour rivaliser avec les poids lourds du genre comme Memories of Murder. On en ressort avec une petite pointe de frustration, comme si A GIRL WITH CLOSED EYES n’avait pas complètement su exploiter son potentiel. Dommage.
Tummy Monster (2024)
Synopsis
Alors qu’il est en train de se morfondre sur sa vie de merde dans son salon de tatouage, Tales reçoit la visite inopinée d’un mystérieux client. En pleine nuit… Et quelle n’est pas sa surprise de constater qu’il s’agit d’une star planétaire du rap, accompagnée de son garde du corps. Flatté, Tales n’hésite pas une seconde à dessiner un crobard sur la peau de l’idole de sa nièce et, une fois...
L'Avis de Geoffrey
Tummy Monster, c’est le genre de thriller psychologique en huis clos qui vous prend par surprise. Au départ, on pense avoir affaire à une scène relativement banale : un tatoueur déprimé, une star du rap qui débarque en pleine nuit, un garde du corps un peu flippant, et le tatouer qui demande un selfie à son célèbre client. Et puis, sans prévenir (enfin, on avait quand même eu quelques indices préalables), le film bascule dans une guerre de nerfs déroutante, tendue, parfois absurde, mais franchement captivante.
Ciaran Lyons nous enferme dans un salon de tatouage et réussit à y créer une tension constante grâce à une réalisation maîtrisée, mais surtout à un jeu d’acteurs irréprochable. Lorn Macdonald et Orlando Norman livrent tous deux des performances habitées, et on finit peu à peu par s’attacher à leurs personnages, malgré la situation improbable et l’ambiance délétère.
Je ne vais pas vous mentir : au bout de 30 minutes, j’étais prêt à lâcher l’affaire. Et puis, sans trop savoir comment, le film m’a eu. Par ses dialogues, ses silences, ses petits basculements de pouvoir. Par cette montée progressive qui questionne notre rapport aux célébrités, à l’image, à la façade sociale que chacun se crée.
Tummy Monster est au final un film tout à fait étonnant, un duel psychologique que je suis très content d’avoir vu au BIFFF, car il est probable que je ne serais pas arrivé au bout en le regardant dans mon salon. C’est ça aussi la magie du BIFFF.
RUB YOUR TUMMY OR I’LL THINK YOU’RE AN ASSHOLE !
California King (2025)
Synopsis
Perry, vendeur de matelas dans une petite ville californienne, veut impressionner la fille de ses rêves. Avec l’aide de son meilleur pote, il décide de simuler un kidnapping pour se faire passer pour un héros. Spoiler : évidemment, rien ne va se passer comme prévu...
L'Avis de Geoffrey
Premier long-métrage d’Eli Stern, California King est une comédie noire aussi drôle que futée, portée par un casting surprenant et une énergie franchement réjouissante.
Le film brille d’abord par ses personnages très bien écrits, mais aussi et surtout par des dialogues aux petits oignons. C’est drôle, rythmé, parfois absurde, mais toujours avec une vraie sincérité derrière. On sent que le réalisateur aime ses personnages, même quand ils sont à côté de la plaque.
Le scénario est malin et bien construit, avec un vrai sens du timing comique et quelques rebondissements bien sentis. Et au-delà des gags, il y a une vraie morale pour Perry, qui va apprendre à grandir à sa manière.
Côté technique, le montage est ultra efficace, et la bande-son funky, ponctuée de bruitages façon cartoon, donne au film un ton unique, un peu décalé, un peu rétro, mais terriblement attachant.
Avec Travis Bennett, Victoria Justice et Joel McHale en pleine forme, California King réussit le pari d’être à la fois loufoque et touchant, et s’impose comme une belle surprise dans le genre de la comédie indépendante.
La Mort d'une Licorne - Death of a Unicorn (2025)
Synopsis
Elliot et sa fille adolescente Ridley écrasent accidentellement une licorne. La famille Leopold, propriétaire d'un labo pharmaceutique, ne tarde pas à s'emparer de cette créature magique et leurs scientifiques découvrent que sa chair, son sang et, surtout, sa corne sont dotés de propriétés curatives surnaturelles, que les Leopold cherchent à exploiter...
L'Avis de Geoffrey
Ah ça, il était attendu, ce film d’Alex Scharfman ! Imaginez donc : Jenna Ortega et Paul Rudd face à des licornes enragées. Si ce concept ne suffit pas à vous vendre du rêve, je ne sais pas ce qu’il vous faut, haha ! Mais trêve de plaisanteries, au-delà de son postulat un peu barré, que vaut le film ?
Eh bien, j’ai le plaisir de vous annoncer qu’il est vraiment très sympathique. Le duo père/fille (Ortega et Rudd, donc) fonctionne très bien grâce à l’alchimie des acteurs, et la famille capitaliste avec laquelle ils doivent cohabiter est impeccablement écrite et interprétée par un casting trois étoiles (Will Poulter, Téa Leoni, Richard E. Grant et Anthony Carrigan, tout de même).
Et les licornes, dans tout ça ? Leur traitement est assez réussi, puisque, sans trop vous spoiler, on est loin des animaux féériques que l’on connaît. On pourrait juste leur reprocher quelques effets spéciaux (très) approximatifs, mais globalement, c’est du bon travail.
En deux mots, DEATH OF A UNICORN (ou LA MORT D’UNE LICORNE en Belgique) est un petit plaisir pour les amateurs de cinéma gentiment déviant : drôle, original et porté par des acteurs de talent. À voir.
Drop Game (2025)
Synopsis
Violet, une jeune veuve qui pour son premier rendez-vous depuis des années, se rend dans un restaurant très chic où celui qu’elle doit y retrouver, Henry, est encore plus charmant que séduisant. Mais leur alchimie naissante va vite être gâchée quand Violet se voit harcelée puis terrorisée par une série de messages anonymes sur son téléphone. Contrainte au silence, elle doit suivre les instructions qu’elle reçoit, sous peine que la...
L'Avis de Geoffrey
Christopher Landon, scénariste et réalisateur de plusieurs Paranormal Activity, de Freaky et des Happy Birthdead, nous revient avec un film à concept, cette fois une jeune femme coincée dans un restaurant et forcée de répondre aux demandes d’un criminel sans en avertir son entourage. Un concept déjà vu maintes fois (coucou CARRY-ON), mais toujours casse-gueule, et qui donne lieu ici, au final, à un petit thriller en huis-clos tendu et plutôt bien interprété.
Le script est (un peu) malin, et pour peu qu’on ferme les yeux sur quelques invraisemblances (le piratage informatique de tout et n’importe quoi notamment ; la passivité du « date » de l’héroïne), le film tient plutôt bien ses promesses.
Le décor du restaurant est joli et assez bien exploité, et je dois dire que la réalisation est vraiment pas mal, avec des textes en surimpression et quelques jolis effets de mise en scène.
En résumé, DROP GAME n’est pas le thriller du siècle, ni même celui de l’année, mais constitue malgré tout une bonne petite surprise de la part de Christopher Landon.
Avec DEAD TALENTS SOCIETY, John Hsu (qui nous avait déjà offert le très bon DETENTION) frappe fort et signe un bijou de comédie fantastique à la fois drôle, flippante et mordante, qui pourrait presque apparaître comme une extension taïwanaise du monde des morts de BEETLEJUICE ou le pendant asiatique de FANTÔMES CONTRE FANTÔMES.
Imaginez un monde où les fantômes doivent faire le buzz avec leurs apparitions terrifiantes, cumuler les vues et rester dans les tendances sous peine de disparaître… définitivement. Bienvenue dans l’au-delà 2.0, où le like vaut plus que la paix éternelle.
Derrière son univers déjanté, le film dénonce avec une vraie finesse les dérives de la société du paraître, l’obsession de la réussite et la pression sociale, le tout sans jamais oublier d’être fun, généreux et inventif. Ça fourmille d’idées visuelles, de gags macabres, de critiques bien senties et de moments vraiment touchants.
Les acteurs sont excellents, la réalisation est maîtrisée de bout en bout, et le scénario est brillant dans sa manière de jongler entre humour noir, critique sociale et fantastique grand public.
En somme, Dead Talents Society est un film qui coche toutes les cases de la réussite. Inutile d’en dire plus, vous devez le voir.