Alice Sweet Alice
Préparez-vous car aujourd’hui, c’est communion. Et en attendant que vous récitiez vos prières par cœur, je vais vous parler d’Alice, Sweet Alice.
Grâce à Rimini, une maison d’édition déguisée en père Noël toute l’année, vous allez découvrir un slasher un peu particulier, et sorti quelque temps avant le maître-étalon du genre, à savoir le Halloween de John Carpenter.
« Dites Sweet, Alice. Allez ! »
Alice Spages (Paula Sheppard), âgée de 12 ans, vit avec sa mère divorcée et sa sœur Karen (Brooke Shields). Tandis que celle‑ci s’apprête à faire sa première communion, on retrouve son cadavre mutilé dans l’Église. Les soupçons se tournent bientôt vers Alice…
Deux ans avant le chef-d’œuvre de Carpenter, Alfred Sole (chef décorateur pour la série Castle ou encore le récent reboot de MacGyver) réalisait cette petite pépite à l’atmosphère diaboliquement anxiogène. Nous y suivons le désarroi de parents dont une des filles fut assassinée le jour de sa communion dans des circonstances plus que troublantes.
Je commencerai par ce qui m’a le plus frappé, c’est-à-dire le désarroi cité plus haut. Dans sa première partie le film se concentre sur cet aspect, sans négliger celui du slasher. Il le collera ensuite de très prêt dans la seconde. Le basculement se fait dans un crescendo maitrisé par une mise en scène subtile : slasher, drame, thriller et re-slasher. Décidément, j’aime les petits budgets. Car ils poussent à se surpasser ! En gros, Alice… est l’antithèse du « cul entre deux chaises ».
« Vous voyez bien qu’il ne faut pas grand-chose. »
J’ai toutefois quelques réserves concernant le casting. J’avoue qu’il me parait trop… statique. Est-ce dû à la facture télévisuelle de l’époque ? Certainement. Mais j’ai préféré me concentrer d’abord sur le principal, car combien de films imparfaits aimons-nous ? Quand bien même je suis d’avis que pour apprécier les qualités d’un film il faut non seulement rester ouvert sur ses qualités mais aussi sur ses défauts.
J’ai rapidement vu venir « la couleur », mais cela ne m’a pas empêché d’être déstabilisé par plusieurs passages. Et quand j’y réfléchis, il s’agit de TOUS ceux où l’on voyait le tueur ! Un exploit. Je ne savais pas qui, ni comment et encore moins pourquoi. Des incertitudes qui me donnèrent un froid dans le dos constant depuis la très dérangeante première scène de meurtre. Un passage impensable aujourd’hui ! Alice, Sweet Alice n’hésite pas à érafler l’image conventionnelle du gamin innocent, en plus de proposer une véritable réflexion autour du poids de la religion.
Bref, Alice, Sweet Alice, c’est du bon ! Du slasher qui ne reste pas dans les clous balisés du genre, et donc qui se doit d’être vu par les amateurs qui en ont marre de manger toujours la même soupe.
Comme d’habitude, le combo Rimini se présente sous la forme d’un Digipack à trois volets, glissé dans un fourreau cartonné. Vous y trouverez l’indispensable livret signé Marc Toullec et intitulé Le Bon Dieu sans confession (20 pages), mais aussi une présentation du film (24’) par Gilles Gressard, écrivain et historien, qui revient très largement sur le casting, sur la place d’Alice, Sweet Alice dans le registre du slasher, les thèmes du film (l’enfance vénéneuse, une réflexion sur l’influence de la religion sur la famille et sur les cas psychanalytiques que la religion peut engendrer), la carrière du réalisateur Alfred Sole, ses inspirations et ses problèmes de financement, sans oublier son statut désormais culte. Du travail d’orfèvre, une fois encore.
Un film de Alfred Sole
Avec : Linda Miller, Mildred Clinton, Paula E. Sheppard, Niles McMaster