Voir la fiche complète du film : Another (Tsutomu Mizushima, Hiroyuki Hata, Yukina Hiiro - 2012)

Another - Critique

À mi-chemin entre le thriller psychologique et l’horreur, Another est un anime de haute volée qui profite d’une scénarisation soignée, elle-même soutenue par la rigueur apportée au développement des personnages. Sous couvert de thématiques communes dans les récits horrifiques japonais (les affres de l’adolescence, le système éducatif, les malédictions…), l’intrigue se plaît à manipuler son public au fil d’une trame tendue et bien articulée pour maintenir l’intérêt jusqu’à son terme.

Publié le 18 Avril 2021 par Dante_1984
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Adaptations de romans ou de nouvelles

La culture nipponne possède une aura particulière avec les histoires horrifiques, sans doute est-ce dû à son folklore ou sa propension à dépeindre des atmosphères particulièrement glauques. Le constat se vérifie aussi bien avec les longs-métrages que les animes. Pour ce dernier format, on compte également des incursions particulièrement saisissantes, comme Higurashi, Ghost Hound ou Yamishibai. Fort de son succès littéraire, Another bénéficie de sa propre adaptation en douze épisodes. Le roman de Yukito Ayatsuji, lui-même reprit sous forme de manga, est assez représentatif de ce qu’une telle incursion peut fournir en matière de réussite artistique et scénaristique.

À l’image de son ambiance étrange, l’intrigue d’Another se veut singulière à bien des égards. Dès les premiers instants, la narration insuffle un véritable mystère autour de ses personnages. Sous couvert d’une symbolique forte, l’entame joue sur les codes des histoires de fantômes asiatiques. Couloirs glabres et lumières capricieuses à l’appui, la mise en condition profite d’un savoir-faire évident pour susciter non de l’effroi, mais une suggestion toute subjective de phénomènes paranormaux. Preuve en est avec Mei Misaki qui évolue en divers lieux sans que quiconque la remarque ou lui porte la moindre attention.

Tout est donc agencé de telle sorte à inspirer des émotions ou des impressions précises ; qu’elles soient biaisées ou pas. Au spectateur de se faire sa propre interprétation des évènements dépeints en fonction de sa perception et de sa sensibilité. Cette première partie se tourne sciemment vers le thriller psychologique avec une approche très mature de son récit et des implications qu’il sous-tend. Bien que la suite progresse vers des strates horrifiques, la narration préserve cet aspect pragmatique, comme si la notion de réalité demeurait essentielle pour ne pas sombrer dans la folie qui guette chaque protagoniste.

Cela se traduit notamment par un « whodunit ? » détourné pour distinguer l’intrus au sein de la classe. Dès lors, la dynamique d’Another se fait sur plusieurs niveaux. À l’instar du coupable dans un roman policier, on se plaît à chercher les indices et les allusions qui permettent de faire la lumière sur les évènements qui touchent cette classe de collège. Là encore, l’identification et l’empathie aux différents intervenants restent assez fortes. Tout comme eux, découvrir la clef du mystère revient à mettre fin au phénomène et à épargner les survivants. À certains égards, le cheminement peut paraître alambiqué, notamment lorsqu’on prend connaissance de l’objet des manifestations. Il n’en demeure pas moins une scénarisation poussée et bien trouvée.

En parallèle de cette complexité sous-jacente bienvenue, on se confronte à une violence frontale. Son aspect abrupt, presque inattendu, tient souvent à un malheureux concours de circonstances, un enchaînement de conséquences incontrôlées… Sauf quelques exceptions, chaque mort semble donc être le fruit d’un accident, comme un câble d’ascenseur qui cède ou une chute dans les escaliers. Ce qui permet de rendre d’autant plus percutante la brutalité des trépas ; gerbes d’hémoglobine et souffrances physiques à l’appui. Définitivement, le récit s’ancre dans une tonalité cinglante, presque cruelle, dans cette manière d’orchestrer la mort des protagonistes.

Au final, Another démontre que l’anime est un support adéquat pour dépeindre une histoire horrifique sur la longueur. L’œuvre de Yukito Ayatsuji se distingue par la qualité de son intrigue tortueuse, très habile dans les processus de manipulation narratifs. Entre fantastique et réalisme, le spectateur atermoie entre différentes considérations, tour à tour ballotté entre des explications rationnelles et une horreur surnaturelle. Le cheminement sensible et maîtrisé se rapproche d’investigations propres au thriller ou au polar, tandis que les évènements mettent à mal une réalité faite d’illusions où les faux-semblants ne sont pas ceux auxquels on peut s’attendre. Il en ressort une incursion saisissante, soutenue par une atmosphère funeste, suggérant l’inéluctabilité de la mort.

Portrait de Dante_1984

A propos de l'auteur : Dante_1984

J'ai découvert le site en 2008 et j'ai été immédiatement séduit par l'opportunité de participer à la vie d'un site qui a pour objectif de faire vivre le cinéma de genre. J'ai commencé par ajouter des fiches. Puis, j'ai souhaité faire partager mes dernières découvertes en laissant des avis sur les films que je voyais.

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