Voir la fiche complète du film : Boogiepop phantom (Takashi Watanabe - 2000)

Boogiepop phantom - Critique

Un anime qui sort de l'ordinaire à tous les niveaux. Climat nébuleux et angoissant, caractérisation des personnages mis à vif, histoire sombre, complexe et tortueuse, bande-son exceptionnelle. Boogiepop phantom est une plongée dans la folie humaine. Là où plus rien n'a de sens si ce n'est la mort.
Publié le 2 Janvier 2013 par Dante_1984
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8
À Tokyo, des étudiants disparaissent mystérieusement dans les rues de la ville. Les bruits de couloir abondent sur le Boogiepop, le dieu de la mort, qui serait responsable desdites disparitions.

Si ces quelques lignes résument grosso modo le point de départ de Boogiepop phantom, il sera d'autant plus difficile de poursuivre sur la suite de l'histoire. À cela, une raison particulière : il n'y a pas vraiment de trame établie et l'on plonge dans un univers délétère et sombre sans trop savoir où l'on met les pieds. Tout d'abord, le récit a été fragmenté sur douze épisodes, jusque-là rien d'anormal. Seulement, c'était sans compter la profusion de personnages qui, tour à tour, dévoile un pan de l'intrigue. L'ensemble s'avère passablement incompréhensible et l'on peine vraiment à saisir l'importance de chaque intervenant.


Itadakimasu !

Rarement, il m'aura été donné de contempler une telle profusion de points de vue en un minimum de temps. Chaque épisode est l'objet d'un individu isolé qui est attaché plus ou moins au Boogiepop et aux événements surnaturels qui envahissent la ville. Ainsi, on peut les considérer comme une pièce de puzzle à regarder dans l'ordre ou pas. Cela n'a aucune espèce d'importance étant donné que la chronologie n'est absolument pas respecté. Les flashbacks et autres retours en arrière abondent dans tous les sens. Un choix délibéré qui ajoute au malaise et à l'égarement ressenti au vu des images qui défilent dans un chaos malsain, presque pernicieux.

On le comprend, les scénaristes veulent perdre le spectateur sous un flot de données considérables en un minimum de temps. Malgré les épisodes découpés en séquences (qui varie de trois à neuf) indiquant les repères temporels et/ou spatiaux, on ne s'accoutume à ce rythme alambiqué qu'après une grosse moitié de l'anime. Certes, dit comme cela, Boogiepop phantom peut paraître brouillon et abscons, voire réservé à un public élitiste. De ce côté, il est vrai que le spectateur est sollicité dans le sens où il doit faire l'effort de s'impliquer et démêler les noeuds de la pelote de laine. Pour ceux qui y parviendraient, la surprise de découvrir un thriller audacieux et novateur est au rendez-vous.


Boogiepop ?

Au-delà de son scénario en apparence hermétique, l'on constate une ambiance hors du commun. Une mise en scène tortueuse où l'on joue facilement avec l'obscurité pour isoler les personnages. Les plans intégralement plongés dans les ténèbres avec en fond l'intéressé ne sont pas rares. Au contraire, je dirais même qu'ils pullulent. Les couleurs sont fades et tendent vers une gamme monochrome tandis que les éclairages et autres effets de lumières sont saturés à leur paroxysme afin de marquer le contraste entre le monde des vivants et celui des morts (ou plutôt l'entre-deux monde). Deux points de vue aux antipodes qui se rapprochent de par la volonté à dénoncer une civilisation moribonde et apathique face à l'inconnu et l'angoissant trépas qui nous attend tous.

À ce titre, le thème de la mort et ce qu'il engendre chez l'individu occupe une part prépondérante dans l'intrigue. On n'essaye pas de démystifier notre fin. Bien au contraire, on accumule tout ce qui fait de la mort, cette froide, implacable et inéluctable destinée propre à chacun. Les angoisses, les monstres, la peur du néant ou, peut-être, d'une autre vie sont autant d'atours qui permettent d'engranger un effet maximum sur les protagonistes et sur le spectateur. Ledit sujet entraîne bien entendu les questions métaphysiques sur l'existence humaine en nous laissant, une fois encore, dans le doute et l’'appréhension. Que la réponse soit négative ou positive, il demeure que le sens de la vie est nébuleux en fonction de notre caractère.


Menteuse !

En ce qui concerne les personnages, ils jouissent d'un soin tout particulier à leur élaboration. Tourmenté, fou, lâche, misanthrope, paumé, réservé... Les traits sont exploités avec autant d'âpreté que les autres éléments de l'anime. Chaque épisode est aussi l'occasion de plonger dans les méandres torturés de la psyché humaine. Une descente aux enfers qui se terrent dans l'esprit et prennent des allures de traversée du désert face à la solitude, les épreuves et la bêtise de l'homme. On a l'impression que les protagonistes sont des écorchés vifs dont la personnalité a été poncée avec du papier de verre en laissant les plaies à vif.

Bien entendu, le surnaturel occupe une part importante. Il se manifeste sous des aspects aussi divers que variés. Les araignées sur la poitrine de certaines personnes (matérialisations des regrets), de la jeune fille aux papillons lumineux (rémanence des souvenirs perdus), du Boogiepop avec son accoutrement pour le moins étrange ou de créatures monstrueuses comme la manticore. Des hallucinations cauchemardesques où l'on a du mal à situer la frontière entre réalité et illusion, tellement ces deux concepts semblent intimement reliés, voire entremêlés l'un à l'autre.


De jolis papillons pleins de souvenirs !

Un dernier point à souligner : l'ambiance sonore. Des bruitages lancinants. Des sons indistincts. Des mélodies mélancoliques. L'on passe des rires moqueurs aux cris de souffrance. Des notes isolées à des échos malséants. La bande-son se rapproche considérablement de la saga Silent Hill ou de Lain qui joue sur la psychologie et les peurs enfouies dans l'inconscient.

Bref, Boogiepop phantom est un anime déroutant et, à certains égards, dérangeants. Son histoire alambiquée, ses personnages torturés et l'atmosphère oppressante qui règne en son sein renforcent le désespoir qui suintent de chaque instant, de chaque plan. Une impression étrange s'empare du spectateur. L'on perd pied. On ne sait plus trop comment cela à commencer, ni où cela va nous emmener. La succession de points de vue nous empêche de respirer. Petit à petit, les indices clefs prennent forme et leur signification se dévoile plus en amont. Les apparences déconstruites font montre d’une maîtrise rare. Une seule chose demeure certaine, on vit (subit ?) une expérience sensorielle percutante.

Portrait de Dante_1984

A propos de l'auteur : Dante_1984

J'ai découvert le site en 2008 et j'ai été immédiatement séduit par l'opportunité de participer à la vie d'un site qui a pour objectif de faire vivre le cinéma de genre. J'ai commencé par ajouter des fiches. Puis, j'ai souhaité faire partager mes dernières découvertes en laissant des avis sur les films que je voyais.

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Boogiepop phantom
Réalisateur:
Durée:
12 x 25 min
8
Moyenne : 8 (1 vote)

Devinez le film par sa tagline :

To face a goblin king, courage is crucial. So for Scoob and Shaggy, the odds are against them!
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