Sinbad
Les célèbres aventures de Sinbad, personnage emblématique des mille et une nuits, nourrissent l’imaginaire des lecteurs au fil des siècles. Même s’il n’a pas été décliné dans de multiples adaptations comme d’autres icônes (Sherlock Holmes et Dracula pour ne citer que les plus connus), le marin des sept mers compte une petite dizaine de films à son actif depuis les années 1940, un anime japonais et deux épopées télévisées. Dernière en date, la création d’Impossible Pictures tente de conjuguer l’aventure avec un grand A et l’atmosphère orientale empreint de mysticisme des contes dont il s’inspire. Nul doute que le format d’une série se prête à merveille pour développer un voyage épique sinon dépaysant.
En ce sens, Sinbad dispose d’une histoire peu surprenante et néanmoins plaisante à découvrir. Si elle demeure fidèle à l’esprit originel, la trame prend quelques libertés afin de moderniser le tout. La progression exige une assiduité pour suivre le destin de l’équipage du Providence et comprendre leur cheminement. L’apport de la malédiction qui accable Sinbad permet d’ajouter en tension (il ne peut rester plus d’un jour et une nuit sur la terre ferme), tout comme la fréquence des combats chorégraphiés et réalisés avec soin. Les joutes démontrent une certaine diversité tant dans les coups portés que pour les environnements dans lesquels ils se déroulent.
Les escales dans les villes marchandes, les îles (presque) désertes ou les mondes parallèles (des endroits cachés par des sortilèges, tels que le « temple des jeux »), cette odyssée multiplie les tours et détours sans jamais se montrer redondante. Bien sûr, chaque épisode suit un schéma souvent identique dans le fond (une fuite, la quête d’une relique perdue, l’arrivée dans une contrée étrangère et la multitude de péripéties qui se succèdent). Cependant, les confrontations ne sont jamais les mêmes et promettent d’exploiter l’intégralité de la légende. On savourera également la présence d’une atmosphère orientale bien trop rare à l’heure actuelle sur nos écrans.
Cette ambiance tente d’allier un univers fondé sur le traditionalisme et le respect des croyances à un versant tourné vers l’avenir et la modernité. Entre les artefacts antiques, les objets de capture étonnants (le collier de la tigresse qui fonctionne grâce au magnétisme) ou les créatures chimériques, l’on nous offre un panel diversifié à plus d’un titre à défaut d’être pleinement original. Les sirènes, monstres marins, serpents géants ou griffons promettent des antagonistes issues du folklore sans négliger les ennemis humains. Ainsi, l’intrigue joue autant dans l’aventure que la fantasy ; tantôt sur un ton léger avec un humour de circonstance, tantôt sur l’aspect dramatique de certaines séquences.
L’éclectisme se poursuit dans le casting. Peu de figures connues hormis Naveen Andrews (Lost – Les disparus) ou la participation de Timothy Spall ou Dougray Scott, mais cela n’empêche en rien d’apprécier leur interprétation. Outre la pluralité des origines, les acteurs se montrent aussi charismatiques et compétents que leurs personnages sont attachants. À aucun moment, ils ne sombrent dans la caricature de bas étage pour proposer un travail impliqué et passionné par le projet commun qui s’échafaude au fil du récit. La caractérisation se développe de telle manière à faire évoluer chacun sur le plan individuel et également pour l’intérêt du groupe. En somme, les comportements égoïstes cèdent facilement la place à l’altruisme.
Il est regrettable que tant de bonnes qualités ne soient pas récompensées sur le long terme. En effet, la série ne connaîtra qu’une seule saison. Point de faibles audiences en cause ou de budget revu à la baisse. En lieu et place d’explications sur cet arrêt injustifié, sans doute brutal, l’histoire se suffit à elle-même et ne permet pas un prolongement. Un argument discutable étant donné que le final évoquait d’éventuelles pistes pour la suite. On ne le saura jamais, mais en tous les cas, les producteurs auront eu la décence de proposer une conclusion honnête (malgré quelques portes restées entrouvertes).
Au final, Sinbad se destine pour un panel de spectateur assez large. On vaque de mystères en découvertes au pays des mille et une nuits. Ponctuée d’humour et de tragédies, la série compte douze épisodes énergiques et variés. Un voyage plaisant et diversifié où se côtoient mythologie, tradition et modernisme. L’alchimie était loin d’être évidente, mais fonctionne, et ce, grâce à un résultat homogène. On saluera également la prestation du casting, les effets spéciaux et le cadre qui nous font regretter l’arrêt définitif d’une série qui aurait pu nous offrir encore quelques sympathiques excursions. Un divertissement dépaysant plus qu’agréable.
Un film de Andy Wilson, Brian Grant, Colin Teague
Avec : Elliot Knight, Marama Corlett, Elliot Cowan, Junix Inocian