Festival de Gérardmer 2015 - Compte-Rendu

La compétition permettait également de voir These Final Hours, du metteur en scène australien Zak Hilditch, récit pré-apocalyptique relatant les dernières heures sur terre avant l’apocalypse. Lorsque James, trentenaire paumé, tombe par hasard sur Rose, sa vie bascule. Il modifie ses plans pour accompagner la fillette, laquelle cherche son père pour vivre en sa compagnie les quelques heures qui séparent l’humanité de son extinction. Récit initiatique se déroulant dans les dix dernières heures avant la fin des temps, These Final Hours est une œuvre touchante grâce à la relation entre James et Rose. Si le réalisateur ne parvient pas à donner la même consistance à l’ensemble de ses personnages (l’histoire d’amour de James et Zoé est plus bâclée que sa relation avec la fillette), il construit tout de même un beau récit, poignant, sans jamais totalement verser dans le pathos. Si la démarche initiatique est parfois lourdement soulignée – James découvre qui il est au contact de la gamine, allant jusqu’à rendre visite avec sa mère qu’il ne voit plus depuis longtemps –, l’humanité qui s’en dégage est bouleversante.

The Signal est l’œuvre la plus déséquilibrée projetée cette année, à la lisière entre cyberthriller, film de science-fiction, évocation du tout-sécuritaire aux Etats-Unis, voire utilisation du superhéros façon Chronicle, le film de Josh Trank. Le deuxième long-métrage de William Eubank oscille entre toutes ses pistes, au risque de perdre son spectateur en cours de route, parvenant avec difficulté à faire s’imbriquer les pistes narratives et les différentes atmosphères visuelles qui scandent son univers. Jonah et Nic, deux étudiants, pourchassent un étrange hacker. Lorsqu’ils débusquent son domicile, tous deux sont comme happés par une étrange lumière venue du ciel. A leur réveil, ils se retrouvent prisonniers dans un camp militaire, tenu par un curieux scientifique (d’ailleurs incarné par Laurence Fishburne, qui rejoue, à peu de frais, son rôle de Morpheus dans le Matrix des Wachowski). Le scénario ne cesse de basculer d’un fil à l’autre, poursuivant une route sinueuse et chaotique. On ne saurait reprocher à William Eubank son goût pour les ruptures de ton. Il aurait peut-être été préférable qu’il prenne davantage de temps à poser son cadre plutôt qu’à glisser, sans cesse, d’un style à l’autre.

Après Les Ruines, son premier long-métrage sorti dans les salles françaises en 2008, Carter Smith présentait à Gérardmer Jamies Marks is Dead. Ancien photographe de mode, Carter Smith se perd ici dans les méandres d’un teenmovie à l’atmosphère volontairement décalée. Lorsqu’Adam apprend la disparition de son collègue de classe Jamie Marks, il se noie dans une curieuse tristesse, renforcée par l’accident récent de sa mère (incarnée par Liv Tyler, méconnaissable dans le rôle d’une mère de famille sans envergure) et le comportement autoritaire de son grand frère. Un soir, chez une copine, Adam voit apparaître le fantôme de Jamie. Réflexion sur la solitude d’un adolescent, Jamie Marks is Dead pêche principalement par son faux-rythme. Voulant jouer sur une dimension absurde (le film regorge de légers décalages de ton), Carter Smith s’enferre dans un récit sans empathie, dans lequel il est fondamentalement difficile de rentrer. Froid dans sa construction, glacial quant aux personnages qu’il met en scène, le réalisateur américain se perd dans des séquences parfois belles d’un strict point de vue visuel, mais qui manquent d’un réel point d’accroche pour le spectateur. Une déception pour qui a déjà vu son premier long-métrage, Les Ruines, survival ultra efficace qui jouait avec maestria sur l’architecture d’un temple maya.

The Man in the Orange Jacket, de l’Arménien Aik Karapetian, fait également partie des films mineurs de la compétition. Un jeune homme, suite à son licenciement, investit la maison de son patron, le tue et s’installe dans la demeure. Rongé par la culpabilité (enfin c’est manifestement la piste proposée par le réalisateur), il est tourmenté par des visions qui l’assaillent et par une bien étrange visite. Proche de certaines œuvres de David Lynch, le film d’Aik Karapetian pêche par un récit sans queue ni tête, où chacun des indices proposés ne se résout jamais. Voulant laisser son histoire dans l’indécision, le metteur en scène ne fait que proposer des scènes sans vie, où la paranoïa du personnage ne semble jamais réellement crédible. Un film esthétisant sans ligne directrice, dont l’absence au palmarès apparaît tout à fait logique.

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