Better Watch Out
Dans le domaine du cinéma de genre, la période de Noël est bien souvent détournée au profit d’un spectacle gore et distrayant, à défaut d’être de qualité. Cela vaut surtout pour le slasher, mais aussi pour quelques thrillers à tendance horrifique. S’adaptant à des moyens limités tout en distillant une atmosphère oppressante, le «Home Invasion» est ce qui se prête de mieux pour pallier à un budget modeste. Alors quand ce sous-genre met en scène des enfants seuls à la maison et un contexte de fêtes de fin d’années, difficile de ne pas songer à Maman, j’ai raté l’avion ou 36 15 Code Père Noël. La comparaison est incongrue, mais le segment initial s’en inspire clairement, du moins dans les intentions.
Vaut mieux garder le secret sur ce qui l'attend...
Quartier tranquille, demeures cossues, chorale de Noël et bonhomme de neige posent l’ambiance. D’ailleurs, les premiers instants se rapportent à n’importe quel téléfilm de Noël où les vacances fleurent bon avec les rigueurs de l’hiver. En y incorporant une symbolique facile et néanmoins indissociable (sapin, guirlandes électriques...), force est de reconnaître que le ton est donné. Élément qui va presque aussitôt contraster avec la teneur du film. Au vu de la comparaison précédente, d’aucuns estiment que l’on aura droit à un ersatz comico-horrifique du métrage de Chris Columbus. Or, il n’en est rien. Quand bien même, on peut y distinguer une petite touche de cynisme.
D’ailleurs, le rapprochement s’arrête rapidement après une première partie qui débouche sur un retournement de situation assez attendu. Sauf si l’on se focalise entièrement sur le pitch de départ. Certains passages concourent à faire la lumière sur la nature de l’intrusion. Malgré la taille de la bâtisse et le comportement des enfants, on sent bien vite les limites du jeu du chat et de la souris qui s’annonce. Autrement dit, l’élément «perturbateur» qui s’impose en milieu de parcours parvient à renouveler l’intérêt de l’histoire en lui permettant d’emprunter un chemin très différent et nettement plus dérangeant.
Un intrus se cache sur cette photo
Par la même, il est nettement plus difficile qu’à l’accoutumée de parler de l’orientation narrative sans en dévoiler la teneur, car la moindre allusion qui survient peut éclairer le spectateur. Mais ce n’est pas tant le mystère que la progression des relations et des confrontations qui étonnent et nous entraînent dans une spirale infernale. L’on demeure dans le domaine du huis clos, mais, curieusement, ce n’est pas la gestion de l’espace et le sentiment d’isolement qui prévalent. Le scénario fait montre d’habilité pour tenir la longueur tout en égrenant certains éléments afin d’offrir une ambiance qui n’est pas sans rappeler Funny Games.
D’ailleurs, la constance des dialogues - bien que certains soient limités, binaires ou à sens unique - se rapproche d’un traitement similaire au film de Michael Haneke. Là encore, la surprise provient d’une certaine maturité dans les propos avancés, ainsi que dans la dégradation des relations. Quant aux aspects horrifiques, ils demeurent timorés et majoritairement suggestifs. En ce sens, la mise en scène joue de quelques plans décalés, de hors-champ ou de légers retards sur l’action pour susciter davantage de tension chez le spectateur. Des effets classiques et néanmoins bien menés pour obtenir le résultat escompté.
Le meilleur moment de la soirée : déballer ses cadeaux !
Au final, Better Watch Out est un thriller horrifique surprenant. Cela vaut autant pour sa progression que pour la qualité de son intrigue. Campé par un casting restreint et toutefois impliqué, le film de Chris Peckover s’appuie sur une évolution intelligente et singulière de son histoire. Malgré de menus écueils, la tension reste au beau fixe, instillant le doute dans l’esprit du spectateur quant au dénouement. Si les situations vont de mal en pis pour les protagonistes, l’humour noir dépeint par certains n’est pas au rendez-vous. L’ensemble est à prendre au premier degré, quitte à imposer une atmosphère malsaine dans ce que suggère la tournure des évènements. Cynique et amoral ? Sans doute. Amusant ? Certainement pas.
Un film de Chris Peckover
Avec : Virginia Madsen, Patrick Warburton, Levi Miller, Olivia DeJonge