La Prophétie de l'Horloge
Développé pour contenter les petits amateurs de frisson, comme les parents, La prophétie de l’horloge remplit son contrat, notamment par sa richesse visuelle et son enthousiasme communicatif. Pas foncièrement original, il demeure néanmoins un film convaincant à l’ambiance soignée. Peut-être le chaînon manquant entre Harry Potter et Chair de poule…
Lorsqu’on pense aux films familiaux de fin d’année, pour Noël ou Halloween, l’on songe à des productions calibrées pour le grand public. L’ajout d’éléments de fantasy ou fantastique suggère des adaptations littéraires plutôt qu’à des créations originales pour le 7e art. En marge des ouvrages de J.K. Rowling ou les films-live de chez Disney reprenant leurs plus célèbres histoires, il est d’autres initiatives louables, comme La cité de l’ombre ou Cœur d’encre. Si l’on a pour habitude d’associer son nom au domaine horrifique, Eli Roth se lance dans une drôle d’aventure puisqu’il s’agit d’un projet à contre-emploi pour le réalisateur d’Hostel et de Cabin Fever.
Tirée du roman éponyme de John Bellairs, l’intrigue de La prophétie de l’horloge reste assez attendue dans ses fondamentaux. De l’événement perturbateur à la découverte d’un nouvel environnement de vie, la trame se balise de repères facilement reconnaissables pour les plus jeunes. On ne s’embarrasse pas de dépeindre une mythologie qui exigerait plusieurs films (ou livres) pour mieux se concentrer sur l’essentiel. En l’occurrence, l’objectif escompté est de ne pas se perdre sous un afflux d’informations, mais de proposer une alternative à d’autres œuvres. La volonté de s’affranchir de références et de se forger sa propre identité laisse néanmoins place à quelques comparatifs d’usage.
Au vu des thématiques évoquées (la sorcellerie, Halloween...), il est difficile de ne pas effectuer un raccourci facile entre Harry Potter et Chair de poule. Pour des raisons évidentes, la première occurrence résulte de la magie et de son apprentissage par un enfant. Certes, le cadre des leçons est le domicile familial et non une école, mais le fait de dépeindre un univers sous-jacent au nôtre va en ce sens. Si l’on songe à l’œuvre de R.L. Stine, outre la présence de Jack Black dans les productions respectives, c’est par rapport à l’ambiance distillée par la propriété des Barnavelt. L’on reste éloigné des contes macabres, mais l'irruption des automates, des citrouilles ou du cimetière noyé sous le brouillard sont des symboles difficilement indissociables de l’horreur, tout enfantine est-elle.
Si les tenants sont relativement simples, on notera le contexte des années1950 qui tranche avec des métrages contemporains à l’atmosphère stérile. Là encore, l’architecture de la demeure ou la décoration intérieure concourent à créer une aura très particulière où le charme désuet des lieux se heurte à quelques fantasmagories issues d’un autre monde. Le tout est servi par des effets spéciaux sans faille qui ne manquent pas d’imagination quand il s’agit d’exposer des manifestations magiques. L’animation des objets, l’intégration dans des environnements clos et restreints, la variété des sorts... Autant de qualités qui offrent un beau spectacle à l’écran.
On peut même déceler des sujets plus graves et réalistes au fil du récit. On songe au deuil d’un proche, à la notion de famille ou encore aux rôles des parents et la place qu’ils occupent dans la vie de leur enfant. À ce titre, le scénario propose des confrontations assez subtiles entre chaque passé. Le jeune garçon devenu orphelin, la voisine ayant perdu sa fille ou Jonathan Barnavelt, tuteur improvisé ayant quitté le domicile familial. Cet aspect n’est pas forcément prépondérant dans chaque scène, mais il trouve une résonnance particulière, jouant plus sur la maîtrise et l’expression des émotions que sur les éventuelles dissensions des relations entre chaque intervenant.
Au final, La prophétie de l’horloge s’avance comme un blockbuster pour le moins plaisant. Derrière des ficelles narratives assez prévisibles, le film d’Eli Roth n’en demeure pas moins un modèle de divertissement pour réunir un public familial. Il en ressort une approche enthousiaste et dynamique où l’ambiance propre aux années1950 déploie ses atours. Au même titre que la mise en scène, la forme ne souffre d’aucun écueil avec un cadre détaillé et particulièrement inventif pour intégrer la magie dans un quotidien à l’apparence morne et suranné. Une prise de risque minimale, mais qui se solde par un film efficace et qui remplit son office sans trop de peine.
Un film de Eli Roth
Avec : Cate Blanchett, Jack Black, Kyle MacLachlan, Colleen Camp