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The Bat - Critique

Un film considéré comme perdu qui refait surface dans une édition qui conserve les traces du temps. L'intrigue est bien amenée grâce à une excellente mise en scène et une interprétation tout aussi exemplaire. Le mélange des genres est troublant et fonctionne à merveille dans ce huis clos à la fois drôle, étrange et cérébral.

Publié le 27 Février 2013 par Dante_1984
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Au sein d'un vieux manoir, un groupe de personnes qui se connaissent plus ou moins doivent faire face à un dangereux criminel surnommé la chauve-souris. Alors que les disparitions s'égrènent, ils comprennent vite que le malfaiteur est l'un d'entre eux...

Regarder un film muet, c'est comme explorer les balbutiements de l'ère cinématographique. Un voyage (in)temporel à travers l'objectif où l'on a l'impression de découvrir tout un pan historique où les techniques trouvaient leurs marques et s'affirmaient progressivement. Aussi, c'est non sans déplaisir que l'on se penche sur ce film considéré comme perdu depuis maintes années. À côté de productions telles que Nosferatu ou le Faust de Murnau, il paraît difficile de se faire une place au panthéon du septième art. Si The bat n'est pas un incontournable, nous allons voir qu'il mérite tout de même une attention particulière.


Pas vraiment souriant le rongeur ailé.

Plongeons-nous sans plus attendre dans cette histoire (à l'origine une pièce de théâtre) qui connaîtra un remake du même cinéaste en 1930, ainsi qu'une version avec le non moins mythique Vincent Price trois décennies plus tard. Certes, le pitch de départ aurait de quoi faire sourire devant son apparente simplicité. Un voleur masqué, un magot caché, une brochette d'individus tous plus louches les uns que les autres et un vieux manoir isolé. Pourtant, l'intrigue s'épaissit rapidement en multipliant les intervenants alors que le mystère perdure. Le spectateur est directement impliqué en tentant de déceler les indices disséminés assez habilement aux quatre coins de la sombre demeure.

Le jeu n'est pas sans rappeler les romans d'Agatha Christie (et surtout Dix petits nègres qui n'était pas sortie à l'époque) où l'on se plaît à sonder les profils, dénicher les comportements étranges, voire suspects. Le récit policier en est encore à ses balbutiements, mais déjà l'on observe une certaine habilité à manipuler le public pour l'écarter du droit chemin. Même en restant attentif, l'amateur d'énigmes risque d'éprouver quelques difficultés à trouver le coupable. Un constat d'autant plus surprenant que le film a maintenant 87 ans. Toujours est-il que le scénario est très bien ficelé et tient en haleine jusqu'au dénouement.


Un piège à loups pour capturer une bestiole volante ?

Autre remarque plus déroutante : le mélange des genres. Le policier demeure prépondérant, mais The bat joue également avec les ficelles de la comédie et de l'épouvante. Improbable ? Tant ces aspects paraissent aux antipodes, le résultat est difficilement perceptible dans un premier temps. Tour à tour, les situations ubuesques succèdent au vol de la banque, à la découverte d'un cadavre. Puis s'ensuivent dans la seconde moitié des moments plus tendus, tels que la pièce aux chandeliers, l'escalade du toit ou la tentative de capture de la chauve-souris. On sourit, on fronce les sourcils et, même s'il n'effraye pas vraiment, on salue cette idée qui mérite à elle seule le détour.

Le résultat se révèle fluide et bien pensé sous tous ses aspects. Exploit d'autant plus admirable que nous sommes en présence d'un film muet. Par conséquent, cela nécessite de communiquer la totalité des émotions et du ressenti par le seul biais des images. Inutile de dire que les acteurs occupent donc une place primordiale et remplissent leur rôle à merveille. Leurs personnages peuvent faire sourire étant donné qu'ils n'ont rien de bien original, mais l'interprétation est tout autre. La gestuelle, les comportements ou les expressions sont des plus crédibles et ce, malgré, un enrobage pas toujours parfait.


Batman ! ... Batman !

En effet, les premières images de The bat nous font croire que l'on déterre un trésor perdu de la malle de notre grenier. L'aspect saccadé de certaines séquences, l'image hésitante percluse de parasites, de faux raccords jonchent le film. En dehors d'un format 4/3 compatible 16/9, le métrage n'a pas subi les outrages d'une restauration (cf le Nosferatu de Murnau avec des filtres de couleurs du plus mauvais goût). Ce côté désuet contribue grandement à l'ambiance. Pour peu, l'on soufflerait presque sur le DVD pour le dépoussiérer. Pour la bande-son, les musiques de fond ne sont jamais lassantes et collent parfaitement à chaque séquence.

Bref, The bat se révèle une agréable (re)découverte. À travers un mélange des genres pour le moins inattendu, l'on nous sert un film à la fois drôle, étrange et cérébral. Le spectateur se sent directement impliqué et veut comprendre le fin mot de l'histoire avant les protagonistes. La chauve-souris n'est pas sans rappeler un autre chiroptère qui, paraît-il, s'en est inspiré ouvertement. Il est vrai que certaines références sont flagrantes (le phare qui se projette sur le mur avec une ombre évoquant le rongeur ailé). On notera la présence de quelques savoureux jeux de mots et, malgré son apparente prévisibilité, le scénario ménage très bien son suspense.

Portrait de Dante_1984

A propos de l'auteur : Dante_1984

J'ai découvert le site en 2008 et j'ai été immédiatement séduit par l'opportunité de participer à la vie d'un site qui a pour objectif de faire vivre le cinéma de genre. J'ai commencé par ajouter des fiches. Puis, j'ai souhaité faire partager mes dernières découvertes en laissant des avis sur les films que je voyais.

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