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Le Fantôme de l'Opéra - Critique

Lorsque Robert "Freddy" Englund enfile le masque du Fantôme de Gaston Leroux, l'heure est aux réjouissances. La preuve avec cette série B pouvant se targuer d'avoir un acteur génial au sommet de sa forme !

Publié le 1 Janvier 2008 par GORE MANIAC
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De nos jours, à New York, Christine (Jill Schoelen), venue chanter pour participer à un opéra, est victime d'une mauvaise chute et se réveille au siècle dernier, à Londres. Elle se révèle être alors la doublure d'une célèbre cantatrice. Mais, à l'approche de la première d'un nouveau spectacle, le théâtre est l'objet de troublants maux, dont l'instigateur serait le fantôme des lieux (Robert Englund), qui se prend d'affection pour Christine et devient son protecteur.

Classique de la littérature fantastique, qui présente l'originalité de mêler musique classique à une histoire d'amour et de fantôme, Le Fantôme de l'Opéra de Gaston Leroux a fait l'objet de bon nombre d'adaptations cinématographiques. Dès 1925, Lon Chaney jouait le fantôme avant Claude Rains (1943) et Herbert Lom, pour la Hammer (en 1962), devant la caméra de l'illustre Terence Fisher. La version la plus célèbre demeurera pourtant le très musical Phantom of the Paradise, de Brian de Palma (1974), avant que les années 90 ne permettent au fantôme maudit et romanesque de Leroux de revenir sur le devant de la scène. Avant la version d'Argento, Dwight Little signait donc la version qui nous intéresse aujourd'hui. Le principal intérêt de cette nouvelle mouture réside en fait dans le choix du comédien qui campe le rôle titre : Robert Englund.

A l'instar des Karloff, Lugosi, Lee et autres Cushing, Robert Englund est LA figure mythique du cinéma d'horreur depuis les années 80. Celui qui débuta sous les traits d'un extra-terrestre pacifique, voire peureux, dans la série culte V (1983-84), trouve son rôle fétiche sous le faciès carbonisé du tueur d'Elm Street, le fameux Freddy Krueger. Son humour noir et ses crimes, aussi sadiques qu'originaux, feront de son personnage le pire cauchemar des adolescents du monde entier, dès 1984, dans une franchise qui aura eu droit à sept films (plus une série et un Vs Jason dans lequel Fred évinçait le catatonique Jason Voorhees). Certes, ce rôle mémorable empêchera Englund de sortir du carcan horrifique dans lequel il s'est trop investi, mais au moins il aura le mérite d'accorder à son interprète quelques compositions phares dans des films qu'il sauvera souvent par sa seule présence. C'est le cas chez Hooper (Night Terrors, où il campe un Sade effroyable) et aussi un peu chez Little. Cinéaste de commande modeste, il a signé depuis le début des années 90 quelques séries B d'action (avec Seagal ou Brandon Lee) ou fantastiques (un épisode de la franchise Halloween, la suite d'Anaconda), mais son heure de gloire est peut être bien cet énième Fantôme.

Sorti en 1989, ce film possède déjà l'avantage de jouer sur la réputation d'un Englund alors au summum de son art et de sa gloire. Costumes et décors d'époque victorienne sont habilement reconstitués, et la part belle est enfin octroyée au vrai héros du roman. Il y a dans ce Fantôme beaucoup d'éléments propres au héros romantique et torturé cher à tout amoureux de cinéma fantastique, telle la Créature de Frankenstein ou la Bête de Cocteau.

Un visage ignoble oblige un génie à se retirer dans les sous-sols d'un théâtre, dont il devient l'âme protectrice. Englund apporte à ce personnage faustien par excellence (il donne son âme au Diable afin de faire connaître sa musique) une dimension à la fois tragique et effrayante. Car, plus que jamais, ce Fantôme est capable d'aimer, mais aussi de détruire. Quelques scènes permettent à Englund de faire preuve de son immense talent. La scène dans l'auberge glauque, et sa ruelle mortelle, est somptueuse de noirceur et de mélancolie. Celle, plus gore, durant laquelle l'anti-héros se recout le visage, cerne bien toute l'ambiguïté d'un monstre souhaitant retrouver la lumière, mais plus que jamais seul et incompris, abandonné par un monde qu'il souhaite séduire mais qui l'a rejeté depuis des lustres dans les ténèbres de l'oubli. Englund apporte tout son charisme et son élégance macabre à cette créature aussi pitoyable et fragile que dangereuse et démente, redonnant vie au mythe du monstre tant aimé dans l'industrie du cinéma fantastique, mais aujourd'hui quelque peu délaissé, au détriment de tueurs d'adolescents sans classe, dans des slashers insipides.

L'épilogue nous permet de croire à l'intemporalité du romanesque Fantôme, ultime grain de qualité dans un paysage cinématographique de moins en moins sensible à ce genre de raffinement et peu indulgent envers une certaine nostalgie. On regrettera juste la mise en scène parfois poussive, voire par moments scolastique, d'un Little un peu trop petit bras pour exploiter au mieux les multiples possibilités d'une histoire magnifique, mais aussi la succession de scènes musicales parfois agaçantes car répétitives.  La jolie Jill Schoelen (déjà vue deux ans plus tôt dans Le Beau-Père), parvient à capter l'attention, tout comme le reste du casting.

En résumé, ce Fantôme porte bien la marque d'Englund, acteur mésestimé, qui apporte tout son talent à un personnage incontournable du cinéma fantastique, dans une série B qui ne démérite pas.

Portrait de GORE MANIAC

A propos de l'auteur : GORE MANIAC

J'essaie de partager ma passion pour un cinéma méconnu, mais qui mérite incontestablement qu'on s'y arrête !

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