Once upon a time
Depuis quelque temps, le cinéma et la télévision réadaptent au goût du jour les contes qui ont bercé notre enfance. On l'a vu récemment avec Hansel & Gretel ou Jack - Le chasseur de géants. Dans l'univers (impitoyable) des séries, l'on songe surtout au non moins agréable Grimm. Aussi, lorsque l'on met en parallèle la venue de Once upon a time, sorti respectivement en 2011, l'on est enclin à penser que ces deux concurrents jouent sur le même créneau. En ce cas, quel intérêt ? Pourtant, le public (et l'audimat) et la critique sont pour une fois d'accord sur le fait que la série est une réussite. Une deuxième saison bientôt diffusée et un spin-off sur Alice au pays des merveilles prévu pour 2014 font que nous sommes en présence d'une franchise en devenir.
Et si on faisait un marché ?
Pour commencer, il faut couper court avec son concurrent direct : Grimm. Fort heureusement pour nous, les deux univers ne jouent pas dans le même registre. Once upon a time s'attache à la féérie et l'enchantement des contes de fées et les transposent dans notre réalité avec les personnages qui les peuplent. Grimm, quant à lui, s'appuie sur une vérité qui a inspiré les contes des célèbres frères. Par conséquent, la mythologie se fond dans notre réalité au lieu de la supplanter. Autres différences, Grimm use d'enquêtes policières pour faire progresser son intrigue. Ce qui n'est pas du tout le cas dans la série qui nous occupe à présent.
En dépit de la matière première, le scénario de Once upon a time dispose d'une certaine originalité. Storybrooke est une petite ville du Maine où les personnages des contes les plus célèbres sont victimes d'une malédiction et se retrouvent piégés dans notre monde. On les plaint d'avance de devoir s'habituer à une réalité sans magie, sans fantaisie ! Heureusement pour eux, ils sont amnésiques. Enfin, presque... Tel est le concept initial qui ne manque pas de se révéler intéressant. On aura également compris qu'il ne faut pas escompter sur une quelconque fidélité concernant les histoires respectives. Le récit emprunte les matériaux de base pour les tourner à sa manière. Un peu comme la fait Tommy Wirkola pour son Hansel & Gretel, le second degré en moins.
Absolument maléfique !
Pourtant, un problème de taille se présente face au potentiel de départ : comment insuffler de la féérie dans un monde qui n'en contient aucun ? Tout simplement en faisant le parallèle avec leur monde via une succession de flash-back qui exposent le passé de chacun. Le procédé n'est pas nouveau et peut même se révéler à double tranchant s'il est mal maîtrisé (le rythme peut en pâtir ou cela peut trahir des carences narratives). Ici, non seulement on a droit à la partie fantasy qui manquait, mais cela permet d'ajouter en crédibilité au niveau des intentions et motivations de chacun. Le montage se veut fluide et l'alternance entre les deux univers se fait sans heurt.
À cela, les moyens mis en œuvre pour magnifier l'ambiance s'avèrent des plus conséquents. Les décors ont fait l'objet d'un soin tout particulier. Les châteaux, forêts, clairières ou les rues de Storybrooke disposent d'une architecture travaillée et d'un agencement inspiré. Mieux encore, les différents contes font bloc pour créer un ensemble cohérent. Les costumes sont à la hauteur de ce constat. La variété est le maître mot entre les robes de princesses, les armures ou les oripeaux. Les effets spéciaux sont donc plus qu'honorables pour une série télévisée. A fortiori s'ils tiennent sur la longueur.
Ce n'est pas la princesse qui est censée dormir ?
Un bémol sur ce dernier point. La qualité des épisodes se révèle inégale. En se focalisant sur un personnage particulier, l'intérêt s'amoindrit lorsque l'on s'attelle à certains individus. Pis, s'il est vrai que les romances font partie des contes, elles ont une fâcheuse tendance à prendre le dessus sur le fil rouge. De fait, on dénotera des errances qui rendent quelque peu laborieux (anecdotiques ?) certains pans de son intrigue. L'essoufflement se ressent surtout en milieu de parcours et trouve un regain inespéré avec une mise en accusation opportune, voire salvatrice, d'une des protagonistes. Il s'agit là du principal défaut qui donne l'impression d'une certaine inconstance au vu de la multiplication des points de vue.
Il existe également un revers de la médaille à s'appuyer sur des personnages de contes de fées : leur caractère se révèle très manichéen. Pas de place au doute sur les motivations de chacun, mis à part Rumpelstiltskin qui dispose assurément de l'évolution la plus intéressante avec une interprétation tout en nuance de la part d'un impeccable Robert Carlyle. Les autres protagonistes ne sont pas en reste, mais sont un peu moins marquants. En revanche, les acteurs effectuent leur travail comme il se doit et sont des plus compétents. En somme, une palette éclectique de talents qui complètent l'excellent a priori que l'on ressent de manière générale.
C'est l'heure du thé !
Au final, Once upon a time est une série amenée à perdurer sur la longueur si le public suit. Nanti d'un concept singulier, d'une histoire prenante en dépit de quelques longueurs, d'un casting soigné et d'une atmosphère féerique (on le serait à moins en parlant de contes), on a droit à un cocktail bouillonnant où l'enchantement se heurte à notre réalité. L'ensemble se veut fluide malgré son côté fleur bleu qui ralentit le rythme. Toutefois, on éprouve un plaisir non feint à découvrir sous un jour différent les célèbres contes qui ont bercé notre enfance. Les petits comme les grands y trouveront matière à se divertir dans cette séduisante relecture.
La magie fonctionne t-elle toujours ?
Saison 2 : Un retour au pays des contes qui marque un tournant à Storybrooke avec la réapparition des souvenirs de ses habitants. La qualité de la série est toujours équivalente, mais choisit de plus en plus de s’éloigner du matériau original. En soi, ce n’est pas un mal puisque le développement reste soigné et respectueux de l’univers que s’est créé la série. Toutefois, le fait de retrouver Mulan, le docteur Frankenstein, le capitaine Crochet, Robin des bois ou Lancelot du lac rend la narration alambiquée. Il en résulte un manque de cohérence assez flagrant, mais qui n’altère en rien l’atmosphère générale. À cela, les retournements de situation, ainsi que le rythme assez entraînant, permettent de ne pas s’ennuyer. Tout en apprenant davantage sur les anciens et nouveaux personnages via les flashbacks habituels, on a droit à une fournée d’épisodes d’un intérêt constant. Toujours aussi plaisant à suivre.
Saison 3 : Pour cette troisième année, Once upon a time tente d’évoluer en quittant Storybrooke pour le Pays Imaginaire. L’occasion de découvrir de nouveaux intervenants et de développer les têtes connues. L’histoire se scinde en deux parties qui laisseraient à penser en milieu de parcours à deux saisons distinctes. En effet, la seconde moitié effectue un retour dans la ville des contes de fées avec un antagoniste rarement aussi détestable. Le suspense est au rendez-vous, les retournements de situation souvent bien trouvés et la tension permanente qui en découle fonctionnent si bien que les 22 épisodes défilent sans que l’on s’en rende compte. Sans renier ce qui a déjà été initié par le passé, cette saison 3 se renouvelle suffisamment pour éprouver le plaisir récurrent de retrouver Storybrooke et ses habitants dans cette profusion de fantaisie et de créativité.
Saison 4 : 5/10
Un film de Greg Beeman, Mark Mylod, Dean White
Avec : Jennifer Morrison, Robert Carlyle, Ginnifer Goodwin, Josh Dallas