Les dossiers de l'impossible

Le Dossier de la Sorcière des Bell

1804. John Bell, fermier de son état, s’établit à Adams, au nord du comté de Robertson (Tennessee). Ses terres de 320 acres de bonne terre de culture s’échelonnent le long de la Red River.

Durant 13 ans, sa vie s’écoule paisiblement. Sa famille et lui sont des membres actifs de la communauté locale, et notamment de l’église Baptiste de Red River dont John devient même le pasteur. Bref, la famille prospère et tout va pour le mieux.

Maison de John Bell

Jusqu'à la fin de l’été de 1817, quelque chose se produise, quelque chose qui changera leur vie pour toujours. Plusieurs membres de la famille font la rencontre d’étranges animaux autour de la propriété, à commencer par John Bell qui tombe sur un chien à l'allure singulière dans son champ de maïs. Saisissant son fusil, il tire, mais ne parvient pas à retrouver une trace de l'animal. Quelques jours plus tard, Bell se trouve en compagnie de deux de ses fils lorsqu'il voit un étrange oiseau, haut perché dans un chêne. L'animal, plus gros qu'une dinde, est inconnu dans la région. Bell le met en joue, fait feu et semble faire mouche. Ses enfants se précipitent pour ramasser la carcasse du volatile, mais il ne parviennent même pas trouver une plume à terre.

Peu de temps après, Betsy, fille cadette de Bell, raconte qu'elle passait sous le même arbre quand elle aperçut une petite fille « qui se balançait à une grande branche du chêne ». La fillette portait une robe verte et semblait avoir à peu près le même âge que Betsy, à savoir 12 ans. Elle aurait tenté de lui parler mais, alors qu'elle s'approchait de l'arbre, la fillette disparut. Pour finir, un quatrième fantôme, un chien noir qui gronde, apparait plusieurs fois à l'un des esclaves de Bell qui affirme que l'animal s’est évanoui dans la nature lorsqu'il l'a menacé avec un bâton.

Ces événements sont suivis par une avalanche de phénomènes sonores : battements de fenêtres, cognements à la porte, bruits incessants de griffes raclant le plancher, grognements sourds. Chaque jour, de nouveaux sons s'ajoutent aux premiers : gargouillis, de chaines trainées sur les planchers ou râles de quelqu’un qui s’étouffe. Plus inquiétant encore, les montants des lits semblent être rongés par des rats.

La famille Bell est terrifiée, mais ils gardent le problème secret pour au moins une année, même lorsqu'ils sont attaqués dans leur sommeil. On arrache leurs couvertures au beau milieu de la nuit et celui qui s'aventure à opposer la moindre résistance s'attire aussitôt une puissante gifle, assénée par une main invisible.

Ce n’est que lorsque les choses deviennent vraiment intolérables que John se confie à un voisin, James Johnson. Il invite alors M. Johnson et son épouse à s'installer chez lui durant quelque temps. Au bout plusieurs nuits passées dans la maison, M. Johnson suggère à Bell d’en parler à d’autres personnes. Ils forment alors un comité et une investigation s’en suit.

La rumeur se répand et il ne faut pas très longtemps pour que les gens des alentours arrivent afin de voir de leurs propres yeux les évènements qui terrorisent la famille Bell. Exorcistes et spirites accourent vers la petite ville d'Adams.

John Bell

Avec le temps, cette force maléfique s’est tellement amplifiée qu’elle possède maintenant une voix. Lorsqu’on lui demande qui elle est, elle donne des identités différentes. Il est établi par une voisine qu’il s’agit certainement de la voix d’une femme que l’on soupçonnait d’être une sorcière du nom de Kate Batts. Tout le monde se met à croire cette version, et c’est ainsi que la force invisible est appelée « Kate, The Bell Witch » (Kate, la sorcière des Bell).

Au fil des conversations avec l’entité, il semble que « Kate » possède deux raisons principales pour visiter la maison des Bell. La première est de tuer John Bell. Pourquoi ? Personne ne le sait, car Kate n’a jamais voulu en donner la raison. La seconde raison est d’empêcher la cadette de la famille, Betsy, d’épouser un certain voisin appelé Joshua Gardner.

L’ancien instituteur de Joshua, Richard Powell, se montre lui-aussi intéressé par Betsy et, depuis longtemps déjà, il a exprimé son intention de l’épouser. Certaines rumeurs prétendent qu’il est un grand amateur de sciences occultes, et comme l’esprit s’oppose farouchement au mariage de Betsy, aussi est-il soupçonné, sans que rien ne puisse jamais le relier à cette histoire. Betsy et Joshua ne peuvent aller à la rivière, se promener dans la campagne ou visiter la grotte qui se trouve sur la propriété des Bell sans être importunés par l’entité qui les suit partout et les raille constamment. Cependant, si la force invisible aime à harceler Betsy, son père vit aussi un calvaire. L’esprit le hait, souhaite sa mort, et ne se prive pas de lui dire clairement.

Durant les trois années suivantes, Kate tourmente les membres de la famille presque quotidiennement. John et sa fille Betsy sont ceux qui reçoivent les pires châtiments physiques. Betsy se fait tirer les cheveux, pincer, griffer avec une épingle et même battre par la force invisible. John, pour sa part, voit sa langue gonfler au point de l'empêcher de manger et de parler. Tout son visage en est déformé et il a parfois l’impression que quelqu’un lui enfonce un bâton dans la bouche. Il commence à perdre la maitrise de ses muscles faciaux et, avec le temps, s’affaiblit peu à peu.

Kate accomplit finalement la mission qu’elle s’était donnée. Le 20 décembre 1820, John Bell est retrouvé mort. Par la suite, en mars 1821, la jeune Betsy rompt ses fiançailles avec Joshua Gardner. (Elle se mariera plus tard à l'instituteur Richard Powell, lequel décèdera alors qu'elle est à peine dans la trentaine. Betsy restera ensuite veuve jusqu'à sa mort, à l'âge de 86 ans, en 1890.)

Dans sa dernière communication avec la famille, l'esprit promet de revenir au bout de 7 ans. À la date fatidique, seule Lucy Bell et deux de ses fils vivent encore dans la maison. La visite est marquée par quelques bruits insolites, mais inoffensifs. C’est la dernière fois que les Bell eurent à souffrir directement de la colère de l'entité.

Tombe de John Bell

L'odyssée de la famille Bell a fait l'objet de bien des spéculations au cours des années, car c'est un exemple exceptionnellement riche et complexe d'activités paranormales. D'une part, comme le souligne Frank Smyth, « il semble certain que les principaux phénomènes aient effectivement eu lieu ». En fait, des douzaines de personnes en furent témoins, y compris de nombreux étrangers dont l'objectivité paraît incontestable. Betsy et John Bell, les principales victimes, furent examinées par le médecin de la famille qui ne trouva aucune explication à leurs souffrances. Un temps, on soupçonna Betsy de ventriloquisme, mais le médecin plaça un jour la main sur sa bouche alors que la voix parlait et constata ainsi que ce ne pouvait être le cas. Dans le monde où vivait la famille Bell, une petite bourgade pétrie de religion, perdue à la campagne, au début du xixe siècle, trois explications seulement étaient possibles: tous ces événements étaient l'œuvre soit d'un imposteur, soit du démon, soit d'un fantôme. De l'avis des villageois, la Sorcière des Bell était une sorte de combinaison des deux derniers, visite démoniaque contre laquelle il n'était point de défense.

Il existe plusieurs livres sur le sujet, et la légende de la sorcière de Bell fait partie de l’histoire du Tennessee. Il y a des groupes organisés qui visitent les terres des Bell, surtout durant la période d’Halloween. On peut même louer un canot et se rendre à la grotte de la sorcière durant certaines périodes de l’année.

Quelques films se sont inspirés de cette légende, notamment An American Haunting avec Donald Sutherland et Sissi Spacek.

 

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