Fear Street - Partie 3 : 1666
Après un premier métrage poussif et globalement décevant, la saga Fear Street proposait un second opus sensiblement meilleur ; bien plus identitaire et convaincant. Développé sous la forme d’une trilogie, le concept permet de découvrir un cadre commun à des époques différentes. Du moins, apprécie-t-on davantage le fil d’évènements clefs que l’environnement ou le contexte à proprement parler. Avec le deuxième film, on justifiait l’initiative par une explication sous forme de flashback. La trame principale demeure alors ancrée dans les années 1990. Ce troisième opus propose une incursion plus ou moins opportune au cœur de l’Amérique colonialiste du XVIIe siècle.
D’emblée, il est facile d’effectuer un rapprochement avec le procès des sorcières de Salem. Cela tient à l’aspect communautaire de la petite bourgade en devenir, à ces costumes aisément identifiables ou encore à ces préceptes religieux qui régissent la vie de la population. Pour autant, la qualité de la reconstitution historique laisse pour le moins perplexe. On distingue de nombreuses approximations, ainsi que des anachronismes relativement embarrassants. À l’image du premier opus, on a l’impression que la réalisatrice souhaite moderniser son propos à travers un traitement contemporain dans une époque où ce choix ne s’y prête guère.
On songe à cette fête entre adolescents qui s’assimilent à un spring break fauché, consommation de stupéfiants à l’appui. On peut également « tiquer » sur des couchettes particulièrement douillettes ou encore le pauvre quidam lettré. Ce ne sont ici que les exemples les plus flagrants et néanmoins les plus représentatifs pour dépeindre une période avec une certaine légèreté. Il est d’autant plus dommage et paradoxal de constater une ambiance pesante qui, sans se rapprocher de The Witch ou d’autres productions similaires, offre une tonalité discordante au regard des deux précédentes itérations. Car cette troisième partie s’écarte sensiblement du slasher initié par ses prédécesseurs.
À la mythologie de Shadyside et Sunnyvale, on insuffle une connotation occultiste. Certes, il est aisé de la distinguer par la malédiction de la « sorcière ». Pour autant, cet aspect prend une dimension différente, car elle devient tangible et s’éloigne des rumeurs et légendes évoquées jusqu’alors. On y dénote même des allusions faustiennes plutôt bien senties pour proposer un angle d’approche qui diverge des « faits historiques ». Cela tient à des reliquats d’archive et à la tradition orale. D’ailleurs, il s’agit vraisemblablement du point fort de ce troisième opus : offrir une réinterprétation des évènements passés et présents du point de vue des protagonistes.
Pour autant, la période de 1666 ne constitue qu’une partie de ce troisième volet de Fear Street. À mi-chemin, on revient dans les années 1990 en vue d’effectuer une redite du premier film. Certes, il y a une continuité évidente dans la chronologie des faits. Cependant, on se contente de ressasser ce qui a déjà été avancé auparavant sous couvert de la soi-disant relecture évoquée précédemment. Hormis le visage de l’antagoniste, ses faire-valoir demeurent les mêmes et les enjeux sensiblement similaires. Quant au dénouement, il est prévisible dans sa manière d’entrouvrir une piste d’exploration pour une éventuelle suite ; sous forme de longs-métrages ou de séries.
Au final, Fear Street – Part 3 : 1666 est à l’image de la trilogie : inconstante et sans surprise. Malgré de bonnes idées et un potentiel présent, l’ensemble reste ancré dans une approche trop contemporaine pour évoquer des périodes passées et trop frileuse pour sortir des sentiers battus. Si l’on apprécie le cadre du XVIIe siècle, la reconstitution historique manque de rigueur et se complaît dans des approximations flagrantes. La narration souffre également du clivage avec le XXe siècle lorsqu’il s’agit d’effectuer une transition abrupte vers les années 1990. Il en découle un scénario alambiqué, inutilement complexe dans son cheminement brinquebalant pour déboucher sur des considérations manichéennes d’une simplicité confondante. Un troisième métrage correct, mais maladroit à de nombreux égards.
Un film de Leigh Janiak
Avec : Kiana Madeira, Elizabeth Scopel, Benjamin Flores Jr., Randy Havens