La Nuit des morts vivants 3D
Les remakes sont une manne providentielle pour les producteurs. Le scénario est déjà écrit et le succès de l'oeuvre originale les rassure quant à un potentiel investissement. Pourtant, il est un cas un peu particulier : La nuit des morts-vivants. Je ne vous ferai pas l'affront de présenter l'½uvre culte de Romero, ni même de décrire son influence pour le cinéma de genre. Mais il faut savoir que le film est tombé directement dans le domaine public à cause d'une maudite histoire de copyright absente de la pellicule après le changement de titre. De fait, n'importe quel tâcheron autodidacte peut se targuer de s'octroyer le scénario et les personnages sans le moindre souci judiciaire dans l'avenir.
Oui, la 3D anaglyphe c'est moche.
Cette version 3D est donc le second remake à voir le jour. Le premier étant de Tom Savini ET produit par Romero et Russo pour tenter de gagner un peu d'argent. L'entreprise est compréhensible et le film se révèle bon à défaut d'égaler son modèle. 16 ans s'écoulent avant qu'un petit opportuniste de la pire espèce (du genre « Je prends les rênes d'un pilier du genre parce que je suis un cador ! ») ose l'hérésie. Lorsque l'on voit son passif et les moyens en ½uvre, les inquiétudes se muent en certitudes dès les premières secondes : ce remake est abominable à tous les niveaux.
Dès les premières images, un élément se démarque déjà : la 3D. Comme de nombreuses productions récentes, elle est inutile, mal fichue et ne mériterait pas que l'on s'y attarde, voire la nommer tout simplement. Toutefois, il s'agit de 3D anaglyphe. Vous souvenez-vous des lunettes bleu et rouge qui explose les rétines si l'on dépasse la minute de visionnage ? Le film est entièrement réalisé avec cette méthode ! De fait, l'image est dégueulasse et dangereuse pour votre vue. Quasiment tous les plans sont victimes de ce traitement qui annonce un calvaire de 80 minutes, mais pas seulement pour cette raison.
On voit bien que cette jeune femme est terrorisée.
D'emblée, l'on sent le mauvais goût et le kitsch. Un petit clin d'oeil à la version de 1968 et l'on plonge dans cette soupe infâme. On recopie les scènes cultes sans y apporter une quelconque relecture ou un trait d'imagination, si infime soit-il. On a l'impression que Jeff Broadstreet ira jusqu'au bout de l'outrage, mais l'histoire se détache légèrement en milieu de parcours, mais pas pour le meilleur. On a droit à une bande de fermiers trafiquants de marijuana et d'un croque-mort fanatique. On nous dessert des explications confuses et navrantes pour tenter de justifier l'invasion des zombies.
Ca ne convainc guère et le récit s'embourbe dans des incohérences aussi incompréhensibles que grossières. Par exemple, les moments où ils peuvent s'échapper ne manquent pas. Mais les protagonistes préfèrent tailler une bavette ou s'engueuler. Lorsqu'ils se décident enfin, deux d'entre eux montent à l'étage pour se suicider ! Absurde au possible, il ne faut pas non plus compter sur un huis clos oppressant. On ne ressent jamais un sentiment d'urgence, d'étouffement. Personne ne se barricade. Les portes sont presque grandes ouvertes et les zombies daignent s'inviter quand ça leur chante (c'est-à-dire pas trop souvent).
Vous admirez la vue ?
Au demeurant, ces cadavres ambulants font peine à voir. Certains courent, d'autres traînent la patte. On ne sait pas trop sur quel pied danser, mais le plus surprenant est sans doute le fait que quelques-uns sont doués de paroles ! Non seulement les morts marchent, mais ils parlent ! N'espérez pourtant pas communiquer avec ces cervelles en décomposition. Ce que semblent ne pas avoir compris les personnages. Toujours est-il que les figurants disposent d'une gestuelle maniérée pathétique et les maquillages sont dégueulasses. C'est moche, fait avec les pieds et surtout un véritable bras d'honneur à Romero.
En parlant d'insultes, le réalisateur ne s'en cache pas et le fait ouvertement. En la personne du fumeur de joints de service (même s'ils le sont tous à différents niveaux) qui discourt de La nuit des morts-vivants en ces termes : « Le film est fini. Ils sont tous morts. C'était vraiment nul. » Que faut-il ajouter ? Si ce n'est qu'en plus, on fait passer les cinéphiles pour des attardés fumeurs d'herbe au vocabulaire minable. On se trouve au-delà de la caricature. Un véritable affront. Dire que le responsable de cette immondice nous donne des leçons de bon goût ! Triste et consternant.
Bullet time pourri !
Les acteurs ne sont pas en reste. Issus de séries Z ou B, dans le meilleur des cas, seconds couteaux, on nous inflige une palette de cabotinage, d'expressions faciales hideuses et hors de propos ou un temps de réaction très long. Ils débitent leur texte avec mollesse et ne parviennent à aucun moment à trouver le ton juste. Une bande d'amateurs dans des rôles aussi plats et anémiques qu'eux. Mis à part Barbara et Johnny, on ne retrouve personne et les caractères ont été grandement revus à la baisse. Et ce n'est pas la présence de Sid Haig qui rehausse le niveau, bien au contraire.
Cette nuit des morts-vivants 3D s'avère poussive, honteuse et sans nul doute infâme. Entre le plagiat évident et le fait de massacrer une oeuvre incontournable, Jeff Broadstreet en fait une série Z minable qui explose les rétines avec son effet 3D hideux et inutile. L'apocalypse Z est bien mal en point dans ledit métrage et l'on ne peut même pas parler de huis clos oppressant. On ne ressent rien. La musique de fond quasi permanente devient vite pesante. Elle achève un remake opportuniste, lamentable, dénué du moindre intérêt. Le genre d'horreur dont on se passerait bien...
Un film de Jeff Broadstreet
Avec : Brianna Brown, Joshua Desroches, Sid Haig, Greg Travis