Voir la fiche complète du film : La Traversée du temps (Mamoru Hosoda - 2006)

La Traversée du temps - Critique

Drôle, touchant, amusant, intéressant. Les émotions se succèdent, s'entremêlent comme les fils du temps dans ce récit non dénué d'une certaine subtilité. La traversée du temps se révèle un métrage aux multiples facettes. Animation irréprochable, protagonistes attachants, scénario plus complexe qu'il n'y paraît, l'on comprend mieux pourquoi La traversée du temps a mis en lumière son géniteur. Une oeuvre originale qui fleure bon la nostalgie sans faire étalage de mièvrerie.

Publié le 13 Août 2012 par Dante_1984
Voir la fiche de La Traversée du temps
8
Voyage dans le Temps

Le voyage dans le temps est un thème particulièrement chéri au sein de la science-fiction. Outre les classiques du genre tel que La machine à explorer le temps, le septième art ne se lasse pas de nous servir maintes productions plus ou moins attrayantes. Ce sujet est un peu similaire à celui des vampires dans le sens où il est difficile d'innover sur un terrain largement exploité. Aussi, les films qui sortent du lot s'avèrent peu nombreux, mais d'une qualité tout à fait certaine. Dernièrement, on peut citer Time crimes ou Quartier lointain. Pour cet anime, le mariage entre comédie, drame et fantastique fonctionne à merveille.

Étrange cocktail que voici et pourtant La traversée du temps n'est autre qu'une nouvelle adaptation du roman de Yasutaka Tsutsui, ô combien plébiscité au pays du Soleil levant si bien qu'il ne lasse pas les générations et traverse le temps (c'est le cas de le dire) sans prendre une ride. Le message universel derrière une histoire en apparence banale permet cette transition sans dommage. Aventurons-nous dans une brève et néanmoins plaisante brèche temporelle. Nous sommes donc revenus six années en arrière. 2006. Mamoru Hosoda n'est pas forcément connu du grand public et encore moins en Occident. Certes, il n'était pas un novice (à son actif, des épisodes d'animes TV ou le long-métrage Digimon), mais son talent s'envole littéralement avec ce film. Une trajectoire similaire au non moins fameux Makoto Shinkai.


Un vrai cordon bleu cette Makoto !

Au premier abord, le scénario n’a rien de bien surprenant à nous offrir. Une jeune étudiante un peu tête en l'air se retrouve par inadvertance avec le pouvoir de remonter le temps. Fantastique ! Sauf qu'elle l'utilise pour des choses futiles, voire complètement stupides. À côté de cela, l'on découvre son quotidien de lycéenne. Amourettes de circonstances, relations amicales et péripéties dans les salles au rendez-vous. En somme, la vie scolaire dans toute sa splendeur et son ennui. Allez savoir pourquoi, ce n'est nullement rébarbatif ou pénible à suivre. La raison ? Sans doute l'envie de connaître la tournure des événements. Si les changements apportés dans le passé auront une réelle influence sur l'avenir de Makoto ou s'il ne s'agit que d'une distraction sophistiquée.

Cela pourrait être une explication valable, mais vaine sans la présence de protagonistes attachants. Makoto bien sûr, avec ses grands yeux remplis de candeur, de naïveté et d'impatience qui se faufilent dans les méandres du temps avec une aisance déconcertante. Tantôt enjouée et impétueuse, tantôt soucieuse du sort de ses amis. Chiaki, le plaisantin de service qui possède un caractère plus complexe que les apparences veulent bien montrer. Kosuke, le jeune homme séduisant qui n'a aucun doute sur ses envies et son avenir. Un trio rafraîchissant qui permet des interactions à la fois recherchées et cocasses en certaines occasions. À côté de cela, on nous offre un panel de personnages secondaires tout aussi travaillés. Nullement lésé, chacun dispose d'une volonté propre et des aspirations différentes. La timide Kaho, la tante ou la soeur de Makoto ne sont pas forcément très présentes à l'écran, mais ne font pas office de potiches ou de remplissages.


C'est ce qui s'appelle un vrai saut dans le temps.

À ce titre, leur évolution et, par extension, celle de l'histoire, tends vers des propos plus sérieux. Si la première partie du film décrit un quotidien idéalisé de l'adolescence avec ses joies et ses petites peines, la seconde moitié se voit rattraper par l'âpreté de la réalité. C'est un peu comme le temps : impossible d'y échapper. Tôt ou tard, il faut affronter la vérité. Dès lors, le récit prend des aspects plus dramatiques. Notamment sur les conséquences du voyage dans le temps. Certes, nous ne sommes pas en présence de L'effet papillon, mais les propos avancés nous font prendre conscience que rien n'évolue sans contrepartie. Un geste, une parole ou un comportement, tout cela peut contribuer à modifier l'avenir (quand bien même les changements s'avèrent mineurs).

Au niveau de l'animation, on tient un visuel de premier ordre. Outre des couleurs vives et riches, l'environnement anodin (la ville, l'école ou le musée) offre de multiples possibilités pour traduire différents états de fait. En d'autres termes, le cadre est exploité de manière à retranscrire l'irrésistible marche en avant du temps, les nombreux chemins qu'emprunte notre vie pour former notre destin. Des rues qui se croisent, se séparent pour se rejoindre plus loin, des montées ou descentes, des reliefs qui permettent d'évoluer à différents niveaux. La symbolique est subtile et bien amenée. Qui plus est, les sauts dans le passé (assez brefs, il est vrai) se font dans un décor complètement dépouillé où le blanc prédomine des engrenages bien huilés. N'oublions pas également le compte à rebours où les chiffres ne cessent de défiler, véritable matérialisation de ce concept typiquement humain qu'est le temps.


Comment ça ? En retard ? Pas possible !

À noter que la mise en scène accentue le côté inéluctable de chaque existence. Quelques plans en travelling s'accaparent une certaine linéarité pour renforcer cette impression (ex : la séquence en vélo où Chiaki demande à Makoto de sortir avec lui ou la course éperdue de celle-ci lors du dénouement). Une ligne qui va dans un sens unique sans possibilités de retour en arrière. Encore une fois, Mamoru Hosoda ne fait pas étalage de son savoir-faire. Il se contente d'utiliser à très bon escient son talent pour apporter à son film l'épaisseur sous-jacente qu'il mérite. Non seulement, on s'attarde sur une lecture plus profonde de son oeuvre et des messages auxquels elle se rapporte, mais aussi de s'affranchir des autres productions qui ont pour ambition de jouer sur les mêmes cordes.

Bref, La traversée du temps est un métrage passionné et passionnant. Le récit évolue avec nonchalance de la naïveté de l'enfance vers le difficile passage à l'âge adulte ou tout semble plus sombre et amer. Cette progression s'accompagne sur fond d'une trame fantastique où le voyage dans le temps permet de disposer d'une certaine éternité dans le bonheur et l'insouciance. La mise en scène et l'animation se révèlent léchées et irréprochables en tout point. Parfois réaliste, parfois saugrenue dans les expressions marquées des protagonistes, c'est une véritable effervescence qui se déploie pour donner vie à un message intemporel sur les erreurs du passé et la capacité à les changer. D'une histoire assez banale, Mamoru Hosoda est parvenu à retranscrire un film singulier et prenant.

Portrait de Dante_1984

A propos de l'auteur : Dante_1984

J'ai découvert le site en 2008 et j'ai été immédiatement séduit par l'opportunité de participer à la vie d'un site qui a pour objectif de faire vivre le cinéma de genre. J'ai commencé par ajouter des fiches. Puis, j'ai souhaité faire partager mes dernières découvertes en laissant des avis sur les films que je voyais.

Autres critiques

Dagmar : L'Âme des vikings

Dagmar : L'Âme des vikings

Toutes les modes passent, certaines étant plus persistantes que d'autres. En ce moment, le Viking est à la mode. Cela vient sûrement du fait que voir des hommes torse nu, plein de tatouages et avec une bonne grosse hache dans les mains fait fantasmer un nombre d'ados faramineux ou plus vraisemblablement du succès mérité de la première saison de Vikings , ou encore de cette faculté de se...
The Turning

The Turning

À l’instar d’autres fleurons gothiques de la littérature anglo-saxonne, Le Tour d’écrou est un récit qui a été adapté à maintes reprises dont la plus célèbre itération demeure Les Innocents . Le métrage de Jack Clayton s’est notamment distingué par son ambiance exceptionnelle et l’appropriation de l’ambiguïté qui définissait la nouvelle d’Henry James...
Phoenix Forgotten

Phoenix Forgotten

Souvent confondus à cause de leurs similarités et leur mise en scène, le found-footage et le faux documentaire ont rapidement exploité toutes les déclinaisons de l’horreur et du fantastique passées à portée de caméras. Entre les créatures issues de la cryptozoologie, les fantômes et les psychopathes, les OVNIS n’échappent pas au phénomène. Preuve en est avec le déplorable Area51 d...
La Tour du Diable : La Critique Insulaire

La Tour du Diable : La Critique Insulaire

Au croisement de Fog et La Baie sanglante , La Tour du Diable ( Tower of Evil en VO) se pose en série B britannique oubliée, mais savoureuse, sortie en 1972 sous la houlette de Jim O’Connolly. Le monsieur, après avoir collaboré avec Ray Harryhausen sur La Vallée de Gwangi , opère ici un virage à 180° pour plonger tête la première dans le slasher à tendance sexploitation, mâtiné d’...
Secret Santa

Secret Santa

Depuis l’inégale saga Douce nuit, sanglante nuit , le slasher et la période de Noël entretiennent des liens particuliers. Le genre a donné lieu à quelques sympathiques itérations, notamment Black Christmas et son remake ou Very Bad Santa . Par ailleurs, ce dernier montre qu’il est possible d’avoir un traitement décalé et décomplexé pour atténuer la violence graphique au profit...

Devinez le film par sa tagline :

They're back - tougher than ever!
Score actuel : 0
1 pt par bonne réponse, sinon -1 !