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Rambo - Critique

A l'heure où Rambo sort sa quatrième aventure en DVD, retour sur les origines du mythe, avec le film culte de Ted Kotcheff, pamphlet virulent sur le retour au pays des "héros" du Vietnam.
Publié le 1 Janvier 2008 par GORE MANIAC
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De retour du Vietnam, John Rambo, un ancien bérêt vert (Sylvester Stallone), vient rendre visite à un ancien compagnon d'armes, qui vient de décéder. Reprenant la route, il souhaite s'arrêter quelques heures dans une petite ville, mais se fait expulser par un sheriff trop zélé (Brian Dennehy), qui va payer cher son erreur.

Tiré d'un roman de David Morrell, First Blood, le premier Rambo a longtemps été mal cerné par certaines personnes, qui ont érigé Rambo en héros lambda de l'Amerique qui gagne, là où, contrairement à l'autre personnage fétiche de Stallone, le boxeur Rocky Balboa, Rambo se trouve à l'opposé, image vivante du fantôme viêt công, qui hante encore l'Amérique de nos jours, première défaite d'un pays qui pensait être invulnérable, et qui refoula ses soldats honteux dans les quartiers les plus sordides de ses villes.

Certes, les trois suites donneront une image plus saine et plus exemplaire de Rambo, box-office oblige, mais ce premier opus est avant tout une critique acerbe d'une politique américaine qui répète ses erreurs (cf. la crise en Irak), d'où l'intérêt de revenir sur ce film culte.

Loin de l'archétype du héros traditionnel, Rambo est présenté dès le début comme un clochard, un banni, un fantôme qu'on croise mais que l'on ne regarde pas, honte de toute une population qui a préféré rejeter les soldats plutôt que le gouvernement, solution la plus simple. Son dernier frère d'armes mort, Rambo devient la cible d'un odieux sheriff, aussi détestable que le héros de guerre est touchant dans sa détresse extrême et sa solitude. Enfermé et brutalisé, revenu à l'état dans lequel il espérait sortir mais dans lequel on l'a englué, Rambo redevient la machine à guerre froide et inhumaine qui va finir sa guerre à lui, dans des montagnes qui deviendront son terrain de chasse, pour un huis clos forestier dantesque.

La force de ce film est de concentrer toute la bêtise et l'infamie humaine dans les actes d'un représentant de la loi navrant par son manque d'ouverture d'esprit, enfermé dans un cadre de pensée restrictif et basique, à l'image de sa petite ville tranquille et banale. Brian Dennehy, souvent à l'aise dans les rôles de policiers bourrus, explose littéralement avec ce rôle écoeurant et immonde, qu'il campe avec brio, à l'instar de ses adjoints et de Richard Crenna, impartial, froid et dédaigneux, considérant davantage Rambo comme son poulain que comme un être humain.

Ce duel entre Rambo et le sheriff commence et s'achève en ville, les montagnes rocheuses, sauvages, immenses et intransigeantes, abritant les moments les plus intenses de ce métrage brut et sans concessions, durant lequel l'homme lutte à nouveau pour sa seule survie, retournant à des instincts primitifs que Rambo doit à l'armée. Au delà du film d'action musclé et viril, avec des scènes d'une grande violence et d'une rare puissance visuelle, l'autre réussite majeure du film de Ted Kotcheff est de donner une dimension tragique exceptionnelle au personnage titre. Antihéros névrosé, taciturne et asocial, Rambo est une forme de créature de Frankenstein moderne, modelé par l'armée pour devenir un tueur parfait, mais inadapté à la vie quotidienne. Dans le rôle du père sans foi ni loi, Crenna joue à merveille le savant fou moderne, le scalpel étant remplacé par l'endoctrinement militaire et les armes à feu.

Pourchassé car incompris et refusant d'obéir à une hiérarchie qu'il ne comprend pas (la société), dans laquelle il n'a aucun rôle, Rambo devient la bête curieuse, puis à abattre. Néanmoins, l'épilogue, d'une rare force car dénué de toute aliénation sentimentale, fait office d'ultime coup de poing. Au bord du KO, le spectateur participe à un combat titanesque, Stallone, avec son regard perdu et dépressif, apportant une dimension imposante à ce personnage fort car vrai et fragile (la meilleure prestation de l'acteur avec Rocky et Copland).

Tué dans le roman, Rambo survit dans le film. Pour une fois, ce traditionnel happy-end cher à Hollywood est plutôt salutaire, l'antihéros ayant droit à une seconde chance, sortant dignement d'un bain de sang qu'il n'avait pas demandé, produit raté d'une Amérique chancelante, imagerie à nouveau d'actualité. Film corrosif et dénonciateur, ce First Blood, à part dans la saga des Rambo, est avant tout une belle démonstration visuelle du gâchis de la guerre du Vietnam, permettant à Stallone d'asseoir sa popularité avec un rôle pourtant à l'opposé du héros classique hollywoodien.

Portrait de GORE MANIAC

A propos de l'auteur : GORE MANIAC

J'essaie de partager ma passion pour un cinéma méconnu, mais qui mérite incontestablement qu'on s'y arrête !

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