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King of the Ants - Critique

Quand Stuart Gordon s'éloigne de son genre de prédilection, cela donne un thriller malsain très intéressant.

Publié le 1 Janvier 2008 par Laurent
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King of the Ants: ne vous fiez ni à la jaquette ni au titre, quelque peu mensongers. En effet, il n'est pas question ici d'un jeune homme se découvrant être le roi des fourmis, ni d'un pauvre bougre dont la face est dévorée par une armée de formicidés... Même le dos de la jaquette du DVD américain ne reflète pas entièrement le film, puisque les captures horrifiques ne représentent qu'une partie infime du métrage. Seule la tagline "Everyone has a breaking point" ("Tout le monde a un point de rupture") est respectueuse du film de Stuart Gordon. Alors pourquoi toute cette mascarade ? Car Stuart Gordon a opéré depuis quelques années un virage significatif dans sa carrière et les distributeurs hésitent quant à la façon de s'y prendre pour ne pas déstabiliser les nombreux fans du réalisateur. Celui que l'on connaît pour sa trilogie des Re-Animator, mais aussi From Beyond ou encore Castle Freak semble s'intéresser dans ses derniers films davantage à la psychologie de ses personnages, oubliant ainsi le gore, l'horreur et l'épouvante de ses films les plus connus, pour la plupart adaptés d'ouvrages d'H.P Lovecraft. Mais il n'en délaisse pas pour autant l'aspect malsain qui imprégnait l'ensemble de sa filmographie. Dans King of the Ants, tout comme dans Edmond ou dans son dernier film Stuck (inédit en France mais qui jouit déjà d'une excellente réputation), Gordon se focalise sur l'horreur du quotidien, sur les vices de ses personnages et sur l'aspect la plus sombre du genre humain.

Adapté du roman de Charlie Higson, qui signe lui-même le scénario, l'histoire suit Sean, un jeune homme vivant de petits boulots et qui semble s'en contenter. Une rencontre avec un de ses collègues l'emmènera à connaître Ray Mathews, un riche entrepreneur, qui l'engage pour suivre un expert comptable travaillant pour la mairie de Los Angeles et qui enquête sur celui-ci. Puis cette proposition: l'assassiner contre 13.000 dollars. Sean accepte mais son employeur tarde à lui remettre l'argent et finalement l'invite à quitter la ville rapidement pour éviter tout soupçon, sans même le payer. Sean va alors faire du chantage à Mathews et ses sbires: soit ils le payent soit il remet à la justice les preuves accablantes que détenaient le comptable. Mais les voyous décident de le kidnapper et de le séquestrer dans une maison en plein désert. Commence alors le cauchemar pour Sean...

Le film suit donc la déchéance physique et mentale d'un pauvre bougre, sans aucun questionnement moral, qui avance dans la vie sans aucun but et qui entre dans la délinquance de la pire façon qui soit: le meurtre. L'acteur débutant Chris McKenna incarne correctement Sean et à partir du meurtre, l'identification à son personnage est totale. Auparavant, le spectateur est dans le même état d'esprit que lui: déconcerté et naïf. Dans quelle direction va se diriger le film ? Vers un thriller banal autour des affaires crapuleuses d'un entrepreneur ? Vers la recherche du bonheur de Sean ? Vers une histoire d'amour impossible entre le tueur et la femme de sa victime ? Vers une réflexion poussive sur la morale ? C'est sans oublier que l'on est dans un film de Stuart Gordon et que celui-ci va prendre un malin plaisir à nous décontenancer en mêlant ces diverses problématiques comme ce sera le cas dans son film suivant, l'excellent Edmond.

Face à Sean se trouvent le véreux Mathews, interprété par un Daniel Baldwin (Vampires, de Carpenter, mais surtout beaucoup, beaucoup de séries B), et dont la prestation est très moyenne. Sa bande est complétée par Duke (George Wendt, vu dernièrement dans l'épisode Family, des Masters of Horror de John Landis), Beckett (Vernon Wells abonné également aux nanars depuis Mad Max 2) et Carl (joué par Lionel Mark Smith, malheureusement décédé en début d'année), qui vont s'acharner sur Sean lors d'une série de tortures physiques . A ce moment du film on y retrouve tout le talent de Stuart Gordon pour nous montrer la déchéance de son héros. Celui-ci, roué de coups de club de golf durant de longues semaines, commencera à perdre le sens des réalités, montré à l'écran par une série d'hallucinations complètement barrées (une pin-up s'échappe d'un calendrier coquin ou encore une Kari Wuhrer affublée d'un immense appendice masculin...). Mais le film ne s'arrête heureusement pas là, puisque cette expérience semble être une véritable rédemption pour Sean, qui découvre ainsi le but de sa vie: il sera exterminateur...

King of the Ants fait parti de ces films, dont on attend très peu mais dont on découvre les nombreuses qualités au cours du visionnage, et surtout a posteriori. Il faut savoir se laisser porter par les mésaventures de son personnage principal, dont l'existence minable va prendre un nouveau cours, mais aussi se détacher de la structure du film qui peut paraître classique, partitionné en trois parties (introduction, enlèvement et torture, et revanche) mais tout à fait original dans ses enjeux, notamment ses problématiques autour de la morale. Malgré un jeu d'acteurs global très moyen, on passe un excellent moment devant King of the Ants. Mais Stuart Gordon a récemment déclaré qu'il ne s'agissait pour lui que d'une période temporaire, et qu'il devrait revenir très prochainement au genre qui l'a fait connaître: l'horreur. En attendant House of Re-Animator, on se régale de cette intervalle !

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A propos de l'auteur : Laurent

Webmaster/bidouilleur/rédac' chef d'Horreur.net. J'ai créé Horreur.net en juin 2000 à une époque où il n'existait pas de sites français accès sur le genre "horreur", en proposant critiques de films et news régulières.

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