Dans la Perse antique, un prince est accusé à tort du meurtre de son père. Contraint de s'enfuir avec une princesse rebelle, il va tenter de déjouer le complot qui pèse sur sa personne et découvrir une dague capable de faire remonter le temps.
À l'époque du premier jeu vidéo de cette splendide saga (1989), Jordan Mechner était bien loin de s'imaginer le succès retentissant de son futur bébé. Très difficile, exigeant et sans l'ombre d’un doute immersif au possible, ce titre allait s’imposait comme une référence du jeu d'aventures. Si les années 1990 furent une longue traversée du désert avec des portages sur quasiment toutes les consoles et des suites plus ou moins glorieuses (notamment l'opus « 3D »), il faudra attendre les années 2000 est l'avènement des consoles 128 bits pour redorer le blason de la franchise. Mechner surpervise alors l'épisode « Les sables du temps ». Le titre renoue avec un succès commercial et critique. Un constat qui ne s'est plus jamais démenti depuis. Il n'en fallait pas plus pour intéresser les grands pontes d'Hollywood pour en faire une adaptation cinématographique.
Un roi bien entouré.
Les fans de cet épisode et de ses deux suites se souviennent des ramifications scénaristiques que prenait l'histoire à chaque tournant. En cause, des recours aux voyages temporels à plus ou moins long terme qui impliquaient des changements dans le présent. En somme, une sorte d'Effet papillon avant l'heure. Dès lors, on se plaisait à deviner les conséquences de tels ou tels actes de notre prince. Dans le cas de cette adaptation, il semble de la volonté des producteurs de conserver cet esprit, mais, on le découvrira bien vite, dans une tout autre mesure. La dague du temps est bel et bien présente, mais ne se révèle qu'un objet convoité et mystérieux. Certes, le fil rouge du film est axé sur son pouvoir, mais ce dernier n’est pas exploité à sa juste valeur.
Les voyages incognito sont de circonstances.
Utilisées lors de séquences entièrement focalisées sur la dague, les remontées dans le temps n'en demeurent qu'à un stade expérimental. La possibilité de changer le passé se résume simplement à anticiper les actions des autres protagonistes au moment opportun pour éviter un sort funeste. À proprement parlé, les conséquences auront un véritable impact sur l'avenir qu'en fin de parcours. Cet aspect éclairé, il n'en demeure pas moins que l'utilisation de la dague est des plus réjouissantes pour les pupilles. Les effets spéciaux sont irréprochables et proposent une vision novatrice du voyage temporel. On a l'impression d'assister à une expérience de corps astral où le sable prend possession du prince. Ainsi, l'on contemple les événements d'un point de vue supérieur avec l'étrange sensation d'être le témoin de son existence.
Vallées, déserts, montagnes, le Maroc recèle 1 001 trésors.
Blockbuster oblige, l'action est de circonstance. Aussi, le réalisateur privilégie les affrontements tout au long du récit. Fort heureusement, les batailles et les combats dans les rues d’Alamut (par exemple) possèdent une justification dans leur nécessité. Elles sont l'aboutissement des enjeux suscités. Dès lors, on savoure ces joutes impressionnantes. Chorégraphies savamment étudiées et cadre pleinement exploité sont les deux fondamentaux qui régissent Prince of Persia. Outre l'éclectisme des armes (épées, couteaux, fouets, arcs...), l'agencement du décor permet à Dastan moult cabrioles dont l'acteur Jake Gyllenhaal s'est fait un point d'honneur à en effectuer la majorité. Pour cela, le français David Belle a été consulté pour organiser les phases de Parkour. Mis à part quelques filins, la plupart de ces cascades ont été faites sans trucage. Un réalisme saisissant.
Des panoramas absolument somptueux.
Attardons-nous sur un aspect non négligeable du film : son esthétique. Étant donné que le nom de Jerry Bruckeimer est mis en avant, on peut se rassurer sur cet élément. Les moyens sont à la hauteur des ambitions. Avec ses vallées, ses montagnes et ses déserts, le Maroc nous offre une richesse visuelle exceptionnelle. C'est bien simple, l'on se croirait dans la Perse du VIe siècle. En ce qui concerne les villes, la plupart des décors ont nécessité une construction acharnée de la part des ouvriers. Le souk, les porches ou les bâtiments principaux des palais sont l'oeuvre des mains de l'homme. Seuls les plans aériens du royaume Perse, de la ville d'Alamut ou les parties les plus complexes (et imposantes) des bâtiments sont créées à l'aide de l'outil numérique qui se fond parfaitement dans le décor.
Les chiens aboient, la caravane passe.
On remarquera également un contraste entre la Perse et ses motifs islamiques avec la ville d’Alamut, ancré dans un style indien plus souple dans ses agencements. Ce sans-faute est l'oeuvre d'une reconstitution minutieuse même si l'équipe s'est offert une certaine largesse dans les influences (cela oscille entre le VIe et XIe siècle de notre ère). Tout cela aurait été vain sans un souci du détail monomaniaque dans les costumes, les accessoires et les maquillages. Raffinés et somptueux, sans l'ombre d'un doute l'élément qui parfait ce voyage dans le temps digne des contes des 1 001 nuits. Quand on apprend qu'il s'agit de la costumière en chef des trois premiers Pirates des Caraïbes, l'on saisit mieux la qualité du travail accompli.
Les fameux hassansins (ou hassassins) dont la vie est vouée au combat et à la mort.
S'il ne fallait s'attarder que sur les apparences, Prince of Persia est en tout point irréprochable. Beau, soigné, le film jouit d'une richesse visuelle hors norme. Tant sur les décors que sur les costumes, il n'y a rien à redire. Toutefois, on ne doit pas se contenter d'un seul critère pour se faire une idée précise du film. Quand bien même le scénario reste plaisant à plus d'un titre, on attendait un peu plus complexité au niveau de la maîtrise du temps et ses conséquences. D'autant plus que les personnages sont calibrés au millimètre près et, finalement, n'évoluent pas psychologiquement au fil du récit. Aucune ambiguïté possible, les sirènes d'Hollywood et de Disney ne laissent pas de place au doute. Dès lors, le film devient très prévisible, mais n'en demeure pas moins 115 minutes d'un spectacle des plus distrayants.